« Prêts! Action! »
Il y a eu beaucoup de films qui s’intéressent à la manière de réaliser des films, que ce soit des biopics (Chaplin), des films parlant d’une époque précise du cinéma (Babylon), des introspections sur l’art (8½) ou bien tout simplement des films relatant l’histoire d’un tournage (La nuit américaine). Dans ce dernier cas, le film se focalise surtout sur le personnage du réalisateur, étant celui responsable de toute la logistique du tournage et qui reçoit tout le stress lié aux malheurs qui surviennent. Mais il est rare que le focus soit sur une autre fonction d’un plateau. Ce serait bien d’avoir le point de vue d’un acteur tentant de comprendre le film, d’un directeur de la photo qui sert d’intermédiaire à la vision du réalisateur ou, encore mieux, celui du cascadeur.
Ce dernier a la tâche complexe de rendre des scènes d’action convenables à l’écran, ce qui demande toute une logistique et une sécurité à appliquer de son côté. On a certes eu The Fall Guy avec Ryan Gosling, mais c’était plus un contexte pour expliquer les capacités d’actioner du protagoniste et moins une façon de découvrir le fonctionnement d’un film. Mais à Hong Kong, il y a une grande histoire avec le métier de cascadeur, avec des grandes vedettes comme Jackie Chan, Sammo Hung ou Jet Li qui sont connus pour leurs cascades impressionnantes. Il fallait juste patienter pour qu’un réalisateur fasse un film sur le sujet. Ça sera finalement deux réalisateurs, soit Herbert Leung Koon-Shun et Albert Leung Koon-Yiu, qui mettront le sujet en avant avec leur premier long-métrage, le bien nommé Stuntman.
Sam est un ancien chorégraphe d’action de l’âge d’or du cinéma hongkongais reconnu, mais qui a la réputation de mettre son équipe en danger en chorégraphiant des cascades très risquées, dont une qui a paralysé un de ses élèves. Retiré de l’industrie, il y retournera lorsqu’un ami lui demandera de chorégraphier les scènes d’action de son nouveau film qui met en scène Wai, un ancien membre de l’équipe de Sam qui est devenu une superstar. Ce dernier accepte et amène Long, un nouveau disciple. Cependant, la méthode de travail de Sam clash avec les méthodes plus sécuritaires promues par Wai.
Le film se veut une lettre d’amour aux cascadeurs des grands classiques hongkongais des années 80 et 90, qui ont mis en scène parmi les cascades les plus spectaculaires de l’histoire du cinéma, mais pas sans blessures importantes, comme peut le prouver Jackie Chan. C’est là tout le débat moral du film : le risque pour la beauté du film ou bien la sécurité avant tout, Sam étant un vieux de la vieille dont la méthode de travail est certes discutable, mais qui lui a permis de signer des grands classiques, alors que Wai, témoin des abus de son mentor, prône une approche plus sécuritaire et rapide, mais moins spectaculaire. Au milieu de tout ça se situe Long, faisant partie de la nouvelle génération, mais nostalgique des grands films de l’époque, créant ainsi sa propre approche.
Cela permet à Stuntman de montrer l’envers du décor dans la production d’un film à Hong Kong, plus particulièrement tout ce qui est lié aux scènes d’action, démontrant une organisation complexe et le quotidien des cascadeurs. Le film n’offre également pas de réponses absolues au débat, même s’il met l’emphase davantage sur les limites de la méthode de Sam et les conséquences qu’elles peuvent engendrer, notamment lors du tournage d’une scène de braquage tournée sans autorisation.
Le film prend un penchant très mélodramatique, met l’emphase sur les problèmes personnels de Sam, que ce soit sur le tournage, avec son nouveau disciple Long ou bien sa relation compliquée avec sa fille. L’histoire tourne surtout sur la reconstruction de la vie de Sam l’importance de la seconde chance, ce que son retour derrière la caméra lui permet. Le film va peut-être un peu trop vers ce côté, mettant le tournage du film, soit l’intérêt de tout le film, un peu au second plan.
Si Stuntman nous perd un peu dans son côté mélodrame très à l’eau de rose, il offre une vision intéressante du cinéma hongkongais actuel et de l’âge d’or ainsi qu’un questionnement sur la façon de concevoir l’art et l’importance du cinéma.
Stuntman est présenté au Festival Fantasia, les 29 et 31 juillet 2025.
Bande-annonce
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