Un des bienfaits des festivals de films est que l’on ne sait pas toujours sur quoi on va tomber. C’est d’autant plus le cas dans un événement comme Fantasia, qui programme très souvent des longs-métrages au style et ton très décalé. Le spectateur peut donc ainsi tomber sur une belle surprise qui n’était pas sur son radar ou bien vivre une projection d’un film plus que particulier.
C’est cette deuxième option qu’ont dû vivre plusieurs des spectateurs du film Transcending Dimensions.
Shinno, un tueur à gages aux pensées nihilistes, accepte le contrat d’une jeune femme qui demande d’assassiner Maître Hanzo, le chef d’une secte. En effet, ce dernier serait responsable de la disparition de Rosuke, le bien-aimé de la jeune femme. Cependant, Shinno devra faire face aux étranges et puissants pouvoirs d’Hanzo, ainsi qu’à un Rosuke qui est en quête d’illumination.
Une question de spiritualité
Derrière ce film au pitch atypique se trouve un réalisateur nippon reconnu, Toshiaki Toyoda. On lui doit notamment les films Pornostar, Blue Spring et 9 Souls, des œuvres qui mettent en valeur les rejetés de la société japonaise et qui critiquent les mœurs de son pays qui a perturbé sa carrière (il a été blacklisté de l’industrie cinématographique japonaise après avoir été arrêté en 2005 pour possession de marijuana). Ces derniers films, plus particulièrement sa trilogie de courts-métrages Alive, I’m Here et I’m Coming, s’intéressent à la question de la spiritualité.
Transcending Dimensions fait entièrement partie de cette mouvance. Le film met non seulement en scène des prêtres bouddhistes, mais il parle également d’ascension de l’esprit, une philosophie importante dans cette religion. Le réalisateur fait également s’affronter trois pensées philosophiques distinctes. Hanzo est un grand prêtre qui promet l’illumination, mais qui profite de son rang et de ses compétences pour ses propres ambitions, qui sont pour la plupart sadiques. Rosuke représente une vision plus pure du moine bouddhiste, prenant la voie de la solitude et de la méditation pour atteindre le nirvana. Quant à Shinno, ses pensées nihilistes se mélangent avec la nouvelle voie spirituelle qu’il explore pendant le film. C’est le conflit entre ces trois pensées qui alimentent le film. À noter que l’humoriste Chihara Jr est parfait dans le rôle de Maître Hanzo, qui est ici la véritable vedette du film, mais que l’on ne voit pas assez.
Un mélange des styles
Mais Toshiaki Toyoda a également réalisé un film hybride, mélangeant les conflits existentielles avec le film noir, les films d’arts martiaux fantaisistes et la comédie, ajoutant également une petite touche de science-fiction dans une séquence qui rappelle la finale de 2001 : L’odyssée de l’espace, mais en plus pop. La musique signée par la formation jazz punk britannique Sons of Kemet, qui juxtapose des airs plus mystiques et des mélodies très groovy, est très en accord avec ce curieux mélange
Mais si avec tout ce mélange de genres et de styles on pouvait s’attendre à un film fourre-tout dynamique, c’est plutôt le contraire qui se produit. En effet, le rythme est assez lent, voire contemplatif dans certains moments. Un choix particulier qui reflète bien tout le contexte lié au bouddhisme du film, mais qui peut aussi jouer contre le film. Effectivement, plusieurs scènes finissent par tirer en longueur et mériteraient d’être raccourcies.
L’aspect singulier du long-métrage peut aussi rendre confus les spectateurs. Le réalisateur avait averti que le film peut diviser et qu’il s’agit plus d’une œuvre qu’il faut ressentir que comprendre. Un gros pari qui peut faire perdre pas mal de spectateurs. Dans ce cas-ci, le résultat fonctionne plutôt bien.
Transcending Dimensions est un film qui va diviser. Certains pourront aimer l’atmosphère unique du film, d’autres verront le propos passer complètement sous leur nez. Dans tous les cas, c’est une véritable expérience digne de Fantasia et une porte d’entrée dans l’univers de Toshiaki Toyoda.
Transcending dimensions est présenté au Festival Fantasia les 24 et 28 juillet 2025.
