« So they’re like… the good guys? »
[Donc ce sont les gentil?]
En 1983, Claude Berri sort le film Tchao Pantin, dans lequel un pompiste dépressif et alcoolique se lie d’amitié avec un jeune dealer qui se fait assassiner. C’est un film clairement dramatique, mais sa grande particularité est que le rôle principal est interprété par l’humoriste Coluche qui change ici drastiquement de registre. Le film est un immense succès et Coluche a même reçu le César du meilleur acteur. Cependant, le film est rentré dans la culture populaire, car il est cité à chaque fois qu’un acteur habitué au registre de la comédie se met à faire un rôle dramatique, devenant même l’expression « faire son Tchao Pantin » pour les cinéphiles francophones. Bien que l’expression reste très française, on peut voir ce changement de registre chez les acteurs américains. Cependant, c’est aussi le cas pour certains réalisateurs. On peut citer en exemple Adam McKay, passant d’Anchorman à The Big Short, ou bien Todd Philipps, passant de la trilogie Hangover à Joker. La programmation 2025 de Fantasia nous a offert un nouvel exemple du genre, cette fois avec le réalisateur Steve Pink.
S’il ne possède pas la même réputation de grand cinéaste comique américain que Judd Apatow ou Mel Brooks, Steve Pink a quand même signé quelques classiques du genre. Il a notamment co-scénarisé les comédies Grosse Point Blank et High Fidelity, mais a également signé les comédies Accepted en 2006, ainsi que les deux volets de Hot Tub Time Machine en 2010 et 2015. Mais son nouveau film, Terrestrial, marque un gros changement de ton.
Un groupe d’amis rend visite à Allen (Jermaine Fowler), un aspirant auteur de science-fiction qui habite maintenant dans un grand manoir à Los Angeles. Ses amis sont impressionnés et curieux, notamment par une pièce entièrement dédiée à la série de science-fiction préférée d’Allen. Cependant, le doute commence à prendre le dessus, car le comportement de leur ami semble étrange et certaines choses clochent dans la nouvelle demeure.
Il vaut mieux ne pas trop en dévoiler sur le film, parce qu’il fonctionne avec un gros twist qui arrive à la moitié. Un procédé qui est très souvent utilisé dans le cinéma coréen et qui fait du bien à voir dans un film américain. Le début laisse transparaître un certain type d’histoire, avec le titre du film et les allusions à la science-fiction qui guide le spectateur sur ce que le film pourrait être. Mais la deuxième moitié nous amène vers une tout autre direction et donne une tout autre dimension au scénario, menant à une finale dans laquelle toutes les pièces du puzzle finissent par s’assembler. La première moitié aurait pu extrapoler les aspects plus mystérieux pour encore plus mettre en contraste les deux parties du film, ce qui pourrait le rendre encore plus mémorable.
Le script parle aussi de thèmes intéressants, surtout la volonté de réussir et de montrer aux autres que l’on a du succès. Le personnage de Jermaine Fowler représente totalement ces thèmes. L’acteur offre d’ailleurs une superbe performance qui démontre les facettes à la fois attachantes et dérangeantes d’Allen. L’acteur est le meilleur aspect du film, ce qui est d’autant plus impressionnant quand ce dernier est, comme le réalisateur, plus familier avec la comédie. Le principal défaut du film est, quant à lui, qu’il serait en mesure de proposer quelque chose de plus, que ce soit dans son scénario qui pourrait clairement plus jouer entre les genres et surprendre le spectateur, mais également la mise en scène qui reste efficace, mais pourrait se permettre plus de folies.
Cela dit, avec Terrestrial, Steve Pink réussit son pari de changer de registre et d’offrir un film avec un ton plus dramatique que ses précédents films. Il aurait pu expérimenter encore plus, amenant ainsi le film vers un plus gros potentiel. Mais cette première tentative fonctionne et offre un film bien sympathique.
Terrestrial est présenté au Festival Fantasia le 20 juillet 2025.
Bande-annonce
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