« On a enlevé votre mari, on veut 300 000$ dans 12h. »
Les enlèvements sont devenus monnaie courante en Haïti. Alors que Doc (Jasmuel Andri) et Zoe (Rolapthon Mercure) pensaient effectuer un autre enlèvement banal, la mort de leur victime, Ti-Ben (Patrick Joseph), compliquera les choses. En effet, Ti-Ben est le fils du sénateur Benjamin Perralt (Ashley Laraque), qui est à la veille d’une élection à la présidence d’Haïti. Et on réclame 300 000$ US pour sa rançon.
Aucun doute, Doc et Zoe ne sont pas sortis de ce pétrin.
Vouloir montrer une réalité sombre et quasiment devenue ordinaire, de par sa proéminence, est un objectif louable. Bruno Mourral parvient très bien à montrer Haïti dans sa dualité, sa part de lumière et d’ombre.
Avec sa caméra, il se faufile dans les ruelles de la ville, pour nous montrer le quotidien des habitants. Malgré le fait que Doc et Zoe sont des criminels, on s’attache rapidement à eux. Cela est dû à un mélange entre un très bon jeu des acteurs, qui parviennent à les rendre sympathiques et vulnérables, en dépit de leur statut de voyous, et à la manière qu’à Bruno Mourral de filmer ses acteurs en plan rapproché.
Cependant, il reste difficile d’entrer à fond dans l’histoire. Les enjeux et les conséquences sont tellement dramatiques que l’humour a de la difficulté à bien s’insérer et nous faire rire. Si certains dialogues font mouche et parviennent à nous faire sourire, le sérieux des conséquences reste omniprésent et ne nous permet que très peu de légèreté.
Et c’est dommage, car on ressent la passion et le talent de tous ceux qui ont travaillé sur le film. Que ce soit devant ou derrière la caméra, on voit le souci de faire une bonne histoire et de bien la raconter.
Ce qui rend le tout si tangible et tragique, c’est qu’on sait que c’est le quotidien des gens d’Haïti. Parmi les membres de l’équipe du film, trois ont été enlevés en 2021 durant la production du long-métrage. En 2022, un assistant à la conception des décors a été tué et un des acteurs, Ralphe Théodore, a également été assassiné en 2023.
Je ne sais pas si c’est ce regard extérieur qui m’empêche de trouver ce film drôle. Le fait que je vis dans un pays sécuritaire et que le danger d’un enlèvement ne fait pas partie de ma réalité. Je serais curieuse de visionner ce film avec des Haïtiens, pour voir si ces péripéties offrent effectivement une catharsis humoristique.
Personnellement, j’ai peur que le marketing du film en tant que « comédie noire » nuise à son succès. Je l’aurais davantage montré comme un drame ou une sorte de thriller politique. Mais après tout, l’humour est subjectif et si cela parvient à vous faire rire, j’en serais la première ravie.
Bande-annonce
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