« – Is this a part of the show?
– I don’t know… But I’m so into it. »
[Est-ce que cela fait partie du spectacle?
Je ne sais pas… Mais j’aime vraiment ça.]
Pour Laura (Melissa Barrera), la vie ne pourrait pas être pire. Sur son lit d’hôpital, après une chirurgie pour un cancer, elle se fait larguer abruptement par son copain Jacob (Edmund Donovan). Ne pouvant plus vivre chez ce dernier, elle est obligée de retourner chez sa mère, absente à la suite d’une retraite au spa et sa seule amie, Mazie (Kayla Foster), est toujours occupée, laissant Laura seule dans son malheur… Jusqu’à ce que, par une nuit d’orage, elle découvre un monstre (Tommy Dewey) dans le placard de sa chambre.
La réalisatrice et scénariste, Caroline Lindy, a ici la possibilité d’élaborer le récit de son court-métrage original du même nom, sorti en 2019. Même si elle le décrit comme un film d’horreur anti-romantique, il ne faut pas s’attendre à un film d’horreur typique. S’il y a quelques petits moments de suspense et des codes empruntés au cinéma d’horreur, il n’y a rien d’effrayant dans l’histoire. L’horreur de l’intrigue est plus subtile. Il est dans le quotidien de Laura, suite aux multiples abandons violents qu’elle a vécus au moment où elle en avait le plus besoin. Ce n’est donc pas surprenant qu’en dépit de son apparence monstrueuse, Laura s’attache très rapidement au Monstre, qui semble être le seul à se soucier d’elle.
Une mention spéciale aux maquillages et prothèses utilisés pour le Monstre, car l’effet est très réussi et il n’est pas trop contraignant pour l’acteur Tommy Dewey, qui parvient à bien rendre les émotions du Monstre.
La chimie entre les deux acteurs principaux, Melissa Barrera et Tommy Dewey, fonctionne à merveille et nous permet de s’attacher rapidement à leur histoire et aux émotions qu’ils vivent. Melissa Barrera vole chacune des scènes dans laquelle elle apparaît. Définitivement une actrice à suivre.
L’histoire d’une femme qui tombe amoureuse d’un monstre existe depuis longtemps, que se soit dans les livres, les films ou autres médiums artistiques. Encore tout récemment, Les Formes de l’eau a remporté l’Oscar du meilleur film. La prémisse de base n’a donc rien d’original et voyant la bande-annonce plusieurs pourraient y voir une simple version moderne du film d’animation de La Belle et la Bête de Disney.
Pourtant, ce film parvient à faire mieux que ce film d’animation, en rendant son héroïne active et en lui donnant un arc narratif, chose qui ne se produit pas pour le personnage de Belle.
Petit aparté : je ne déteste pas le film d’animation de La Belle et la bête et je ne suis pas de ceux et celles qui tombent dans la critique facile de juger ce film comme étant problématique à cause du fameux « syndrome de Stockholm », dont Belle ne souffre pas du tout si on prend la peine de lire un peu sur ledit sujet et si on voit les agissements de cette dernière dans le film (vous avez le droit d’être en désaccord, j’y ai cru moi aussi, mais renseignez-vous et réécoutez le film et vous verrez que Belle n’agit pas du tout comme une personne étant victime du syndrome de Stockholm). Fin de l’aparté.
Ce qui me pose problème avec le film de Disney (et les autres de son époque), c’est que son héroïne et personnage principal n’a aucune évolution de personnage. Belle reste exactement la même personne qu’elle était au début du film. Le seul personnage qui fait un cheminement et évolue dans le récit, c’est la Bête. Belle est donc un personnage de soutien dans sa propre histoire.
Dans Your Monster, Laura est le personnage central et sera celle qui évoluera et posera des actions pour changer. Son arc narratif ne tombera pas dans le prévisible « voir au-delà des apparences » ou « la vraie beauté se trouve à l’intérieur ». Car le véritable enjeu du film est que Laura doit apprendre à s’aimer d’abord. Elle doit trouver la force de se défendre et de ne pas laisser les gens lui marcher dessus.
Caroline Lindy nous livre ici une œuvre étrange, sans prétention et fort divertissante. On voit que beaucoup de soin et d’attention ont été mis dans le film, malgré quelques petits clichés et petites facilités scénaristiques. Pour un premier long-métrage, le pari a été réussi.
Bande-annonce
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