« You can’t just show up here unannounced. It’s disruptive to the work we do here. »
[Tu ne peux pas venir ici comme ça, sans rendez-vous. Ça perturbe le travail que nous faisons ici.]
Souffrant de graves allergies alimentaires, Cora (Amy Forsyth) quitte tout pour rejoindre une communauté spirituelle qui ne ressent plus la faim.
Avec Inedia, Elizabeth Cairns propose un premier long atmosphérique qui nous plonge au cœur d’une secte vivant dans une ambiance et des rituels bizarrement inquiétants.
Tout au long du visionnement, il y a une question qui reste en tête. À tout le moins, pendant la première heure. Est-ce que la leader de cette communauté est malveillante, ou si elle croit réellement faire quelque chose de bien?
Contrairement au film de secte traditionnel, ici on suit une communauté et non pas un groupe religieux comme on voit lorsqu’il s’agit d’une secte au sens classique. Mais on ne peut faire autrement que de voir cette femme comme dangereuse.
Vous connaissez le concept d’inedia? Fondamentalement, il s’agit d’une idée selon laquelle le corps pouvait vivre sans nourriture, grâce à l’énergie de la nature, ou de la lumière. Mais l’emprise psychologique de cette théorie a clairement des répercussions dommageables sur les divers personnages, sans oublier le manque d’éducation que reçoivent les enfants qui y grandissent. Un exemple? La jeune fille d’environ 7 ans décide d’enterrer un bébé vivant afin de le faire grandir, comme une fleur. Voilà à quoi peut mener des théories new age sans une éducation plus scientifique, voire même, terre-à-terre.
Et on voit très bien que les gens qui sont sur place semblent, pour la plupart, vivre une certaine détresse. Et soyons honnêtes, l’humain ne peut pas vivre sans nourriture.
Tourné en 16 mm, Inedia semble intemporel. Si on fait abstraction des téléphones cellulaires – qui sont d’ailleurs confisqués à l’arrivée des visiteurs –, le film pourrait se dérouler autant en 1999 que maintenant.
Pour Cora, le désir de rupture, la douleur et le deuil mènent la femme à vouloir disparaitre. Ce désir, doublé de l’atmosphère de la secte, donne un film empreint d’étrangeté et de poésie vaporeuse, sublimé par le grain du 16 mm, pour un résultat efficace et réussi.
Le seul point négatif au niveau de l’histoire – ou plutôt de la logique – provient de la façon de traiter de l’allergie. Une personne qui comme Cora souffre d’une multitude d’allergies alimentaires ne se promènerait pas partout sans apporter de la nourriture avec elle. Elle ne se retrouverait pas en voyage à travers la province sans apporter, au moins, un petit lunch.
Mais outre ce détail, le film reste très réaliste, et porte à réfléchir.
Inedia est bien fait. Les personnages sont enrobés d’un certain mystère, sans pour autant être étranges ou mystérieux. La leader de la congrégation est parfaitement floue. On cherche à savoir à quel point elle est honnête envers ses ouailles.
Comment cette communauté survit-elle financièrement? On cultive des pommes, et des prunes. Mais est-ce suffisant? On nous en révèle peux à ce sujet, mais on sème des indices ici et là. Juste assez pour rendre l’intrigue intéressante.
Loin des films en noir et blanc (au niveau des personnages), ce long métrage propose un scénario solide, une direction simple, mais efficace et des acteurs de talent.
Inedia est présenté au FNC les 10 et 13 octobre 2024.
Extrait
© 2023 Le petit septième