En date du 4 septembre 2024, je me rendis à Radio-Canada dans les studios R offrant une vue magnifique sur le pont Jacques-Cartier et l’enseigne Molson (mais où se cache Carmen Sandiego?). En ces lieux, j’avais l’impression de retourner dans mon élément, ou en tout cas pas loin. Les Îles-de-la-Madeleine furent merveilleuses en fin d’août (merci à ma mère et son mari) et j’aimerais bien habiter aussi ce petit coin de pays, c’est toutefois le milieu cinématographique qui m’enchante le plus et qui ne cesse de me surprendre; souvent au moment où je commençais à douter de ses capacités à le faire. Montréal n’est en soi pas si différente, même si la plupart du temps elle me donne envie d’avoir les ailes d’un ange et plus de gazoline.
La mode à toujours été aux héros. Si on y pense bien, les individus portant des uniformes et répondant à la fonction à laquelle iels se sont voués ne datent pas d’hier. Que ce soit des policiers ou des chevaliers, des infirmières ou des guérisseurs, des marquis ou des directrices, la notion de super héros costumés est sûrement très ancienne, et ce, dans la fiction autant que la réalité. Dans STAT, on sauve des vies et dans les derniers films des Avengers on… on doit bien finir par sauver quelqu’un à un moment donné aussi. Selon moi, la ressemblance la plus flagrante entre les quotidiennes et les films de Superhéros se situe davantage au niveau des scènes d’actions répétitives qui dédaignent de se réinventer pour rester captivantes. Alors, on tombe dans le mécanisme facile du potinage à la place du racontage. Vous savez cette manie que l’on a quelquefois de croire que d’énumérer des faits compense pour de la conversation; ou de s’attarder beaucoup trop longtemps sur les faits non connexes à la trame narrative principale, les dialogues en jargon (vous connaissez les trucs aussi là, je les dirai pas tous).
STAT ne peut pas se vanter d’éviter ce genre de redondances, en fait, c’est principalement de quoi la série est faite. Sinon, comment pourrait-on la faire aussi rapidement (4 épisodes par semaine, ce n’est pas rien). André Béraud, le directeur de la fiction et des longs métrages à Radio-Canada, nous a promis une saison qui dépasse l’entendement et dont il est très, très, très, très, très content de pouvoir remettre sur les ondes pour 2024-2025, pour une 3e saison. De mon côté, je ne me fais jamais d’illusions à ce niveau. J’ai cependant un peu peur que dans l’envie d’en mettre trop on en fasse un Game of Thrones; que l’on parte dans tous les sens et qu’on manque de temps pour tout rapiécer en beauté avant de clore. Après avoir visionné les 4 premiers épisodes de la nouvelle saison de STAT, je me demande encore comment l’auteure, Marie-Andrée Labée, saura couper le souffle à son public. Serait-ce le temps d’utiliser ses formules éprouvées et de confirmer leurs efficacités ou sortira-t-elle des sentiers battus au risque de se surprendre elle-même? Qui sait, en attendant, j’ai aussi le droit de rêver que tout peut toujours finir par s’arranger. Espérons qu’Emmanuelle, interprétée par Suzanne Clément, pensera la même chose avec Jacob, interprété par Lou-Pascal Tremblay, surtout après la finale de la saison précédente.
Quand un événement comme celui-ci se conclut, c’est souvent là que se font aller les poignées de mains et les interviews avec les différents médias (salutations à mes collègues). Pour ma part, c’est souvent l’effet inverse qui se produit. Je tombe dans un état de réflexion et de contemplation; de là, j’essaie de savoir ce qui serait le plus pertinent à poser comme question selon une multitude de facteurs (dont la qualité du traiteur Robert Alexis). J’espère surtout être pertinent et avoir la capacité qu’on me comprenne bien. En retour, j’offre la même chose à celles et ceux que j’interpelle.
Le Québec accompagne le personnage principal de la série depuis deux saisons déjà et en plus de s’attacher à la protagoniste, Emmanuelle, on a aussi eu la chance de côtoyer celles et ceux qu’elle garde proches de son cœur et que le public a également appris à aimer à son tour. Plus la quotidienne avance, plus les personnages secondaires évoluent et plus ils prennent de la place à l’écran. Rien qui ne semble ébranler l’actrice qui se dit heureuse pour l’engouement que les gens ont envers les autres personnages. Néanmoins, elle croit aussi en la capacité de son personnage à se dépasser et à nous surprendre. Tout est encore possible pour la quotidienne numéro un au Québec. Jusqu’à présent tout le monde est de retour pour cette 3e saison. Celles et ceux qui attendent impatiemment l’apparition d’Antoine Bertrand seront déçus d’apprendre que notre Louis Cyr du grand écran ne sera pas présent pour la première semaine de la quotidienne. Pour le voir, il faudra regarder la suite!
J’ai aussi eu le privilège de m’entretenir quelques instants avec Marie-Andrée Labbée entre deux bouchées (quel butor fus-je?). Étant moi-même scénariste (largement moins connu qu’elle, évidemment), il m’est toujours très intéressant d’échanger avec mes pairs du milieu de l’écriture. Il faut dire que chaque écrivain rêve d’avoir une tribune où iel pourra s’épancher de son être et du monde qui l’a vu naître, et ainsi peut-être mettre un peu plus de sens à la vie humaine là où il semble ne rien avoir. Le but de l’auteure de STAT est bien clair : divertir son public le plus possible et réussir à les garder fidèles aux rendez-vous, car selon elle le milieu infirmier est très inspirant pour son travail. En sortant des studios de Radio-Canada, j’ai réalisé que j’aurais aimé lui demander si elle se trouvait chanceuse d’occuper cette position. Félicitations pour votre beau programme, on souhaite beaucoup de succès.
Fabienne Larouche ne se lasse pas de s’associer au succès, Hollywood se l’arracherait (parce qu’il n’y a pas de mal à travailler pour plusieurs compagnies différentes). STAT commence à s’ériger tranquillement au même rang que ces autres séries semblables dont les habitants du Québec raffolent; paraît-il. On pense à Virginie, Trauma, District 31 et je ne sais plus quoi tellement il y en a. Il ne faut pas se le cacher, le marché de nos voisins d’en dessous (non, pas le film de Réal Béland) nous influence et insidieusement façonne notre imaginaire. On voit comment le recyclage nous tient à cœur ici. Pourquoi jeter le lait? On peut toujours en faire du fromage ou du yogourt bien de chez nous!
Le lait frais, ça, c’est celui qui vient des États-Unis. Après, nous on achète le lait — parce que le nôtre on l’achète pas ça l’air — et on se cale une pinte comme on dit sans vérifier la date de péremption. « C’est comme ça qu’ils font le lait les Amaricains », qu’on se dit et on le laisse à la discrétion d’un public plus ou moins averti qui peine à savoir d’où provient ce qu’il ingère dans la vie de tous les jours. Au niveau de nos productions télévisuelles, le public québécois est sujet aux mêmes tendances. On a du mal à rattraper le temps perdu à force de vouloir faire comme les « big shots » et à l’occasion j’ai l’impression que l’on oublie de se demander ce que les gens d’ici voudraient exprimer comme idées ou pensées nouvelles. Est-ce que les émissions de Radio-Canada représentent une réalité d’ici ou cherche-t-on simplement à nous divertir sans trop de profondeur avec des formules étatsuniennes éprouvées?
Pour ce qui est de se renouveler, mon avis est qu’au Québec, on n’ose pas assez et on dégringole dans le kitch. Ça finit par ressembler à une relation de couple un peu plate. Le moment où on prend l’autre un peu pour acquis et que l’amour fait place au quotidien. Si le but est de divertir, je vois mal où la répétition monotone devient une surprise divertissante. Bien sûr, il arrive que l’on montre du sang, des morts, des tragédies; mais que Dieu nous garde de faire de l’horreur — ou la science-fiction, de la fantaisie, film de guerre, et cetera — un genre cinématographique prisé au Québec. Ici, on aime rire et être triste, mais jamais en venir aux larmes; on ne voudrait quand même pas se mouiller. Pourtant, le public moyen doit commencer à être habitué après tout ce temps et s’attendre à un peu de nouveau, non? Ne vous inquiétez pas chers amateurs de surnaturel et de mystique, Édith Blais, la voyante interprétée par Marie-France Marcotte, revient faire un tour sur le plateau de STAT dans la saison 3!
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…Ça parait tu assez que je prépare du spécial pour la saison de Halloween?
À vous maintenant, cher lectorat. Je vous laisse sur une petite chanson de Fabienne Thériault qui saura peut-être mettre en perspective quelques passages de cet article.
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