« Tous les trous du cul de la secte vont mourir aujourd’hui. »
Dans un village à la campagne, Joo Se-jong vend de l’alcool de contrebande avec ses deux frères cadets. Lorsque quelqu’un décède après en avoir bu, ils doivent se rendre à Hwaseong pour récupérer la boisson mortelle avant qu’elle ne tue quelqu’un d’autre. En cours de route, ils croisent deux sinistres individus qui terrorisent les villageois. À présent, ils devront lutter pour leur propre survie face au duo meurtrier.
Si le Western est considéré comme un genre cinématographique entièrement américain (en même temps, ça parle de l’histoire du pays), ça n’a pas empêché d’autres pays de l’explorer. L’exemple le plus populaire est sans aucun doute l’Italie, qui a révolutionné le genre en créant les westerns spaghettis, dont certains comme la Trilogie du Dollar et Il était une fois dans l’ouest, tous réalisés par Sergio Leone, sont devenus des classiques du cinéma. Mais d’autres pays se sont imprégnés de l’imagerie du western, notamment l’Australie et le Brésil, et même des pays asiatiques.
Contrairement aux autres pays cités qui possèdent une géographie leur permettant de revisiter le western à leur culture, les films asiatiques se contentent seulement d’imiter le style et les gimmicks des westerns américains. Il y a par exemple le film japonais Sukiyaki Western Django, réalisé par le prolifique Takashi Miike, le film thaïlandais Tears of the Black Tiger, qui a été remarqué au Festival de Cannes de 2001, ou bien Sholay, l’un des plus grands succès de l’histoire de Bollywood. Dans le cas de la Corée du Sud, le célèbre réalisateur Kim Jee-won a réalisé en 2011 Le Bon, la Brute et le Cinglé, une relecture déjantée du Bon, la Brute et le Truand de Sergio Leone. Mais avec son nouveau film Mash Ville, le réalisateur Hwang Wook propose ici une approche unique du genre.
En effet, le long-métrage ne se déroule pas dans une époque éloignée, mais dans notre monde contemporain, dans un village où se retrouve un groupe de trafiquants d’alcool cherchant leur cargaison empoisonnée, deux cultistes qui ont tué tous les habitants, un fermier survivant du massacre, un policier zélé ainsi qu’une accessoiriste de cinéma ayant trouvé un corps dans l’arrière de la voiture.
L’imagerie du western est ici fortement utilisée, que ce soit la colorimétrie très chaude, donnant l’impression d’être dans le désert, son trio de fabricants d’alcool clandestins ou bien ses deux tueurs armés de winchester. Avec des changements de décors, de costumes et d’accessoires ainsi que de pays, le film pourrait tout à fait se dérouler dans l’Ouest américain. Mais ce n’est qu’un des genres qui compose cet amalgame de types cinématographiques, incluant la comédie noire, le thriller, le film fantastique et le film d’action. Un mélange des genres si réputé au sein du cinéma sud-coréen, ce qui donne une expérience de visionnage unique, remplie de personnages hauts en couleur.
Mais si les plus grands réalisateurs arrivent à mélanger plusieurs genres tout en gardant une ligne narrative bien structurée, par exemple Bong Joon-ho qui arrive parfaitement à harmoniser la comédie, le drame social, le thriller et le film d’horreur tout en traitant des inégalités sociales dans Parasite, Hwang Wook a plus de difficulté à trouver cet équilibre. Non pas dans sa manière de jouer avec plusieurs styles, même si l’on sent une plus grosse importance sur la comédie, mais plutôt dans la manière de raconter l’histoire.
Le film se veut ouvertement décalé dans sa narration, proposant des péripéties loufoques qui ont l’air de sortir tout droit de films de Quentin Tarantino. Le problème, c’est que le film en fait trop et qu’au lieu de totalement s’investir dans tous les twists de l’histoire et à se perdre dans ce nid à problèmes avec ces personnages, on passe le plus claire du temps à se demander ce que l’on est en train de regarder et pourquoi tous ces choix ont été pris.
Avec Mash Ville, on sent que Hwang Wook voulait offrir une expérience cinématographique différente, un mélange absurde entre la comédie et le western qui se détacherait de la masse. C’est un exercice de style qui est louable, mais si c’est juste pour faire un film étrange sans aucun sens ou message derrière, l’intérêt du spectateur va vite se perdre.
Mash Ville est présenté au Festival Fantasia, le 21 juillet 2024.
Bande-annonce
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