« Qu’est-ce qui fait bouger le corps, le cœur ou la tête? »
Et si mon histoire et mon milieu de vie influencent ma façon de bouger? Qui tire les ficelles? La mémoire, l’esprit ou le corps? Une figure féminine navigue entre les écueils et nage entre les vagues de sa propre vulnérabilité.
Avec If my body had a name, Hoor Malas tente de trouver sa place à l’intérieur des délicates limites où ces frontières se confondent et se confrontent.
Ce solo de danse que propose Hoor Malas débute avec une longue séquence où la femme est allongée au sol, sans bouger pendant de longues minutes, alors qu’une musique lente aux teintes tragiques joue. Ça dure assez longtemps pour que le spectateur se questionne à savoir si tout est correct.
Éventuellement les mouvements commencent à entrer en scène, de façon saccadée, alors que le corps quasi inerte fait des sursauts, des soubresauts, bondit au sol pour se déplacer tranquillement. L’artiste mise sur le mouvement plus que la danse en termes plus classiques. En utilisant ces mouvements saccadés, elle crée une ambiance floue qui laisse le spectateur dans une sorte d’incertitude. « À quoi sommes-nous en train d’assister? »
Puisant ici dans le théâtre physique qu’elle entremêle à la danse contemporaine, Hoor déploie un univers singulier, onirique, qui incarne son histoire personnelle et sa manière de voir le monde.
En constante recherche d’harmonie entre la pensée et le mouvement, la chorégraphe et interprète pousse son spectateur à réfléchir, à tenter de comprendre ce qu’il observe et à trouver ses propres réponses. Nous l’avons vu dans la discussion d’après show, alors qu’un homme présent y voyait la violence vécue lors du règne de Bashar al-Assad. De mon côté, cette même séquence m’inspirait toutes les agressions qu’une femme peut subir.
Mais ce qui ressort avec plus de consensus, c’est la gestuelle teintée de l’imaginaire moyen-oriental qui évoque le contrôle social de ses origines. De sa performance qui pourrait être scindée en 3 grands mouvements, la deuxième partie montre une grande violence que l’on peut donc interpréter de plusieurs manières. C’est probablement aussi la partie du spectacle la plus intéressante.
La première partie est plutôt constituée de petits mouvements saccadés, au sol, et la dernière partie montre plutôt une danse traditionnelle du Moyen-Orient. La réflexion mène aussi à voir comment le passage à la maternité a influencé cette artiste. On peut reconnaitre dans la première partie plusieurs mouvements qui laissent imaginer un jeune enfant qui apprend à se déplacer, à bouger, à interagir avec son environnement. C’est probablement là que la prestation de Hoor Malas est la plus intéressante. Elle permet au spectateur de passer par plusieurs stades de la vie et d’y apercevoir l’évolution non seulement de l’Artiste, mais aussi de chacun de nous.
Un spectacle à voir, tout en sachant qu’il sera déstabilisant.
If my body had a name est présenté au festival Accès Asie les 15 et 16 mai 2024, à l’Agora de la danse.
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