« Mais tsé, fais-toi s’en pas avec ça. Elle a besoin d’un gars… boring like you. »
Gordon est un looser mignon et attachant qui enseigne l’anglais au secondaire, Sophie est une femme ambitieuse, chef de cuisine dans un restaurant voulant toujours le meilleur. Ce couple vit paisiblement à Brooklyn, jusqu’à ce que Sophie se voit proposer un entretien pour un poste de chef exécutif à Québec, sa ville natale. De là, chez les beaux-parents, les aventures s’enclenchent.
Pour leur première incursion derrière la caméra, le duo James A. Woods et Nicolas Wright nous offre Chez les beaux-parents (French Girl). Comédie romantique emmenée principalement par Evenlyn Brochu et Zack Braff et qui verra les salles obscures le 15 mars prochain.
Je ne suis pas un fan des comédies romantiques. Malgré tout, le genre reste un des plus appréciés du grand public par sa simplicité, sa facilité de s’identifier aux personnages, et bien sûr par sa thématique universelle (ah l’amour!). Mais au fil des années, l’attrait pour ce genre qui a connu ses heures de gloire jusqu’au début des années 2000 semblait s’essouffler à mesure que ses codes qui faisaient sa force se sont transformés en clichés connus à peu près par tout le monde. Bien sûr, on ne peut pas généraliser et rien que l’exemple de Simple comme Sylvain vient rappeler que bien manier ses codes ou même les déconstruire peut-être un tour de force glanant au passage des prix un peu partout dans le monde.
Est-ce peut-être de là que vient l’idée de Chez les beaux-parents? Surfer sur cette vague pour amorcer un nouveau cycle? Remanier les codes du genre ou nous donner une petite dose de nostalgie?
Je ne plongerai pas dans ces suppositions, et je ne m’aventurerai pas à écrire un énième pavé. Cela dit, le film peut se targuer de se doter d’une distribution alléchante sur le papier et de respecter le cahier de charge de ce qu’on attend d’une romcom. Peut-être trop même.
Un couple attachant, un des personnages hors de son environnement habituel (Gordon), l’ex qui débarque, un cadre idéalisé, un mensonge caché, des situations cocasses, le décalage culturel, les défis du couple…
Tout y est… et pour moi c’est bien cela le problème. Tout y est et absolument rien ne manque, rien ne dépasse les lignes, rien ne surprend, rien n’est souligné ou mis en exergue à part peut-être la ville de Québec. Car oui, hormis le fait d’être un film, Chez les beaux-parents prend des allures de carte postale géante pour la ville de Québec. La caméra, le regard du spectateur dans tous les beaux endroits (Le château Frontenac, le Vieux-Québec, la verdure, etc.). Tout est filmé sous les plus beaux angles, tout est chatoyant sans un réel parti pris esthétique.
Une vision artistique très peu marquée, que la réalisation se résumant à être fonctionnelle ne fait qu’articuler la trame narrative comme du papier à musique dont on a entendu la partition un million de fois sans pour autant lui amener une petite touche d’émotion, une vision moderne ou encore des gags humoristiques bien amenés.
Vu sous un certain angle, le long métrage ressemble à une œuvre qui paraît sortir tout droit des années 2000. Une bonne base comme idée sur le papier en remettant au goût du jour certains codes, ou certains écueils lessivés par le temps. Malheureusement, Chez les beaux-parents ne repose quasi exclusivement que sur des McGuffin qu’on sent venir de très (très) loin et qui au-delà d’étouffer les faiblesses scénaristiques, s’immiscent à chaque baisse de tempo auquel le montage essaye tant bien que mal de donner du souffle.
Pourtant, étant doté d’une telle distribution, il y avait de quoi faire! Entre l’élégance d’Evelyn Brochu, le comique potache de Zack Braff et les traits humoristiques de Luc Picard ou encore d’Isabelle Vincent, on pouvait s’attendre à des dialogues ficelés, des séquences montrant toute l’étendue des talents de cette troupe familiale. Mais, pataude, sans grâce, la mise en scène ne rend pas justice aux acteurs et actrices qui semblent surjouer certaines scènes pour donner à leur vacuité un peu de consistance. Quelques passages restent rigolos et touchants, comme le lien entre Junior Tremblay (le petit frère de Sophie interprété par Antoine Olivier Pilon) et Gordon qui donne parfois des scènes légères et un ton bien rythmé.
C’est d’autant plus rageant que le kitch malvenu du long métrage éclipse les touches de modernité vraiment bienvenues du récit, à commencer par la bisexualité de Sophie, ou encore le côté looser magnifique de Gordon qui aurait pu être mieux mis en scène au lieu de cacher le tout derrière des scènes où ce dernier essaye d’échapper à Coucou (le Cygne de la famille).
Je ne suis pas un fan des comédies romantiques, mais force est de constater que plusieurs comédies romantiques commencent à pulluler que ce soit ici ou aux États-Unis. Sans doute, le genre est en train de se chercher un nouveau souffle à l’heure où l’amour 2.0 reste sur bien des points abstraits et où sa représentation se cherche une vision qui maniera à merveille ses codes.
Bande-annonce
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