« Article 34 in the FA guideline, states that whoever receives the verification code must carry out the task to the best of his abilities. »
[L’article 34 de la directive FA stipule que quiconque reçoit le code de vérification doit effectuer la tâche au mieux de ses capacités.]
1988, un jeune diplomate Sud-Coréen (Ha Jung-woo) est chargé de récupérer l’argent d’une rançon pour sauver un collègue diplomate kidnappé au Liban. Un chauffeur de taxi local (Ju Ji-hoon) est accidentellement impliqué dans la mission alors qu’il est un des derniers Coréens laissés pour compte depuis le départ de l’ambassade coréenne du Liban.
Le cinéma est un art libre qui n’a de frontière que dans notre esprit, surtout de nos jours. Avec Internet et la mondialisation, on peut désormais voir tout ce qui se passe ailleurs en quelques clics tout au plus. Pourtant, s’il y a une chose qui a de la difficulté à faire sa place dans la culture populaire c’est bien le cinéma étranger. Enfin, c’était vrai jusqu’à l’avènement du début de la décennie. Quitte à s’être éloignés de nos proches, nous nous sommes étrangement rapprochés de ceux et celles qui étaient loin. Confronté plus que jamais aux sociétés étrangères et à leurs cultures, chacune des nations n’a eu d’autre choix que d’élargir ses horizons.
De plus en plus, je vois paraître dans les cinémas plus – disons conventionnels – communs, des films de partout dans le monde et de tous les genres. Il est toujours étonnant de constater comment les autres pays, loin de Hollywood, utilisent des méthodes différentes pour produire leurs œuvres cinématographiques. Pas en tout point, il faut dire que la mondialisation offre son revers d’uniformisation de certaines façons de faire, mais cela ne veut pas dire moins d’histoire à raconter.
Le film Ransomed, réalisé par Kim Seong-Hun, est un biopic fascinant, car il relève d’un phénomène en lien avec un événement mondial, les Jeux olympiques (ou presque). C’est là où réside selon moi la tragédie des récits que chacun possède d’unique; comment choisit-on de qui l’histoire se rappellera? En effet, le vif de l’intrigue se passe alors que se préparent les Jeux olympiques de 1988 à Séoul; une période reconnue davantage pour l’un des plus gros scandales de dopage des annales du sport. Cependant, c’est précisément à cause de ces Jeux que toute cette histoire prend une proportion quasiment invraisemblable.
Qu’est-ce que représente la vie d’un seul individu à la face de sa nation? Ce sont des paroles prononcées par le premier ministre de la Corée du Sud, durant le film, qui sont venues m’ébranler lors de mon visionnement. En effet, cela me ramena à un autre film – pas nécessairement du même genre – qui soulevait la même question, mais d’un point de vue tout autre. Dans Save Private Ryan, Steven Spielberg aborde la valeur de la vie humaine à travers un milieu qui la voit comme une statistique et pourtant l’œuvre reflète l’importance qu’une vie représente et les sacrifices que nous devons être prêts à faire pour la survie de l’humanité, mais aussi le salut de son âme. Les personnages eux-mêmes questionnent l’utilité d’aller sauver ce « Ryan », alors que l’avenir du monde moderne est en péril. Tout ça pour comprendre que si on ne sauve pas les individus comment peut-on dire que l’on sauve l’humanité.
Cette pensée est la même qui anime le film Ransomed. Il faut comprendre le gouvernement coréen qui à ce moment craint de s’ingérer dans une histoire de prise d’otage avec des pays en situation de guerre. L’information n’est pas fiable à cent pour cent; et risquer de se mettre à dos un autre pays en guerre, en contournant les règles internationales pour un « peut-être » risquerait de leur coûter les Jeux olympiques. Pour Min Joon, interprété par Ha Jung-Woo, un modeste employé des affaires internationales coréennes, l’heure est grave. S’il existe une chance que leur collègue disparu depuis des années soit en fait dans les griffes de terroristes, il se doit de s’en assurer au mieux de ses capacités; c’est-à-dire, d’aller vérifier lui-même et d’aider à le faire sortir de là s’il le faut.
Le film nous offre en action et en suspense les débâcles d’hommes ordinaires qui tentent le tout pour un seul homme donnant du sens à l’expression « un pour tous et tous pour un ». L’histoire de l’espèce humaine ce n’est pas celle des choses qui nous entourent et du temps qui passe, mais plutôt celle de tout un chacun, notre histoire à nous que l’on n’oublie pas (merci Céline). Des gens normaux comme vous et moi qui font de leur mieux chaque jour pour se soutenir les uns les autres. Sans les êtres humains, des évènements comme celui du 11 septembre 2001 ne seraient qu’un amas de béton détruit par un tas de ferraille tombé du ciel, rien de plus. À quoi bon vouloir défendre les institutions si elles nous délaissent en retour à la moindre contrainte? Une question que se posent bien des gens dans bien des milieux et sans doute aussi le réalisateur Kim Seong-Hun.
Au niveau cinématographique le film est bon; les acteurs sont bien dirigés; le réalisateur apporte une touche particulière; la bande sonore aussi. J’ai adoré voir des acteurs arabes et coréens jouer ensemble et se répondre en anglais, sous-titré en Coréen. Il y a de la beauté dans notre diversité tant individuelle que culturelle; des différences qui amènent à voir nos ressemblances que j’appellerais, pour cette fois-ci, complémentarité.
Au final, le tout est fort agréable à regarder et, outrepassé l’œuvre qui reste en soi tout de même très classique, Ransomed n’a pas grand-chose qui cloche. Les protagonistes sont agréables à côtoyer et le récit, malgré quelques longueurs, nous laisse rarement la chance de reprendre une respiration normale. Pourtant, je finis mon visionnement avec un goût amer, mais à la défense du film, c’est tout à son honneur.
Ainsi, je reviens à mon point de départ. Il m’a été difficile de ne pas ressentir de la peine face à tous ces récits que l’Histoire aura oubliée, mais elle renforçait en moi une certitude. La certitude que le cinéma et que l’Art elle-même ont une utilité et même une raison d’être. Si les grands historiens veulent se souvenir des trônes en marbre et des empires en poussière; les artistes seront les témoins et assureront la perpétuité de ceux qui ont été oubliés ou qui n’ont jamais existés; les retourner au tout qu’ils ont aidé à bâtir.
À la fin de Ransomed, un message s’affiche nous montrant que les détails de ces dossiers ne pourront être déclassifiés et rendus publics qu’à partir de 2047; j’aimerai être encore vivant et en santé à ce moment pour l’apprécier à sa juste valeur. En revanche, à quoi bon tous ces jeux de James Bond? N’en sommes-nous pas à un point où l’humanité devrait être plus unie et se faire plus confiance? N’y a-t-il que les Jeux olympiques comme rassemblement où les peuples de la Terre peuvent interagir ensemble en toute confiance et en étant moindrement civilisés (et encore là)?
C’est donc pour cela que je suis très heureux d’avoir pu le découvrir. Un film qui s’adresse à son public avec une certaine humilité et sensibilité; conscient que nous avons tous ultimement quelque chose à raconter, mais que nous n’en aurons pas tous la possibilité. Il est bon de constater que d’autres s’attèlent à accomplir cette inachevable tâche qu’est de nous inscrire dans la mémoire collective.
Je vous souhaite de bien continuer votre propre récit et de prendre le temps de regarder Ransomed (vous en faites pas, ce bout-là sera pas dans le film de votre vie 😉).
Bande-annonce
© 2023 Le petit septième