Tu ne sauras jamais - Une

[Cinemania] Tu ne sauras jamais — Un dernier acte, une ode cinématographique

Dans le cadre du festival Cinémania, le Théâtre Impérial débordait d’enthousiasme vendredi dernier. C’était la toute première mondiale de Tu ne sauras jamais de Robin Aubert, connu pour ses précédents films À l’origine d’un cri (2010) et Les affamés (2017). Le film, une production d’Étienne Hansez pour BRAVO CHARLIE, a vu le jour grâce à l’esprit collaboratif et à l’engagement d’une équipe talentueuse. D’ailleurs, lors de cette soirée mémorable, acteurs et créateurs étaient présents, témoignant de l’union de leurs talents pour la concrétisation de ce projet artistique.

Tu ne sauras jamais - Affiche

Il convient de mettre en lumière le talent de Julie Roy dans l’élaboration du scénario de Robin Aubert. Avec délicatesse, elle a su entrelacer avec finesse les silences et les non-dits, donnant au film une texture narrative riche en sous-entendus. 

Le récit dépeint la quête touchante de Paul Vincent (interprété par Martin Naud), un homme d’âge mûr cloîtré dans sa chambre de maison de retraite qui mobilise toute son énergie pour revoir une dernière fois la femme qu’il aime. Avec ce film, Robin Aubert rend un hommage sincère à la vieillesse, aux soignants des CHSLD et aux bénévoles qui ont été des piliers durant la pandémie. Ce film touche par son authenticité, il parle de vie, de soin, d’adieu, et des petites choses qui nous lient les uns aux autres. Il est là aussi pour nous rappeler la force des liens affectifs, même en fin de vie.

Aubert offre un cinéma d’authenticité rare, loin des effets spectaculaires, il nous offre une œuvre qui reprend un peu les codes du contemplatif. D’ailleurs, Tu ne sauras jamais est un film qui pourrait surprendre ceux qui ne sont pas familiers avec ce genre d’approche artistique. Il est destiné à devenir un classique du cinéma québécois, rappelant que le cinéma est plus qu’un divertissement, c’est un art qui nous permet de voir la vie sous un autre angle.

Le café, autrefois chaud, s’est refroidi.

Tu ne sauras jamais commence sur l’immobilité contemplative d’un mur, gardien des secrets de Paul Vincent, un homme au crépuscule de ses jours. Sept minutes s’écoulent en silence, rythmées seulement par sa respiration sereine; le soleil glisse doucement à travers la fenêtre, marquant le passage du temps. Ce plan introductif, presque méditatif, nous introduit délicatement dans l’univers de Paul, annonçant un récit où chaque instant est précieux. Nous le suivons, témoins discrets de ses journées teintées par l’isolement pandémique, le manque criant de soins, et l’incessante course des heures.

Tu ne sauras jamais - Le café autrefois chaud
Paul Vincent (Martin Naud)

Au fil des scènes, les plaisirs modestes de sa vie se révèlent : l’harmonie du chant des oiseaux, la douceur sucrée des chocolats Lowney à la cerise, et l’affection profonde pour son amoureuse, tout proche, mais inatteignable dans l’isolement forcé du confinement. 

Quelle est la vision derrière la mise en scène?

Au milieu du bourdonnement incessant des réseaux sociaux, des montages effrénés et des blockbusters qui attirent des foules en quête de divertissement instantané, il est facile d’oublier que le cinéma est une forme d’art, avec ses propres codes et conventions.

Tu ne sauras jamais s’inscrit avec délicatesse dans la mouvance du slow cinema, cette branche artistique qui fait l’éloge de la patience et de l’observation minutieuse. Loin de s’embourber dans une narration dense et rapide, le film préfère s’épanouir au travers de plans longs et soigneusement composés, invitant à une immersion complète et attentive. Un peu voyeur, ce style, souvent qualifié de cinéma contemplatif, métamorphose la séance en une expérience méditative, où chaque détail, aussi minime soit-il, est magnifié. Le temps lui-même semble s’étirer, nous permettant ainsi de plonger plus profondément dans l’essence même du récit, car il faut bien se le dire, confiné dans une chambre, le temps devient élastique.

Tu ne sauras jamais - Tu ne saura jamais

Dans cette œuvre, Robin Aubert explore avec acuité les derniers fragments d’une vie, en mettant en scène la solitude et l’élasticité du temps, acteurs principaux d’un tableau dépouillé de toute complexité superficielle. Cette approche résonne fortement avec le film Jeanne Dielman, 23 quai du Commerce, 1080 Bruxelles de Chantal Akerman, monument du cinéma féministe de 1975. L’esthétique minimaliste et le réalisme cru de Tu ne sauras jamais rendent un hommage subtil à Akerman, s’inscrivant dans une tradition cinématographique qui valorise la simplicité narrative et l’impact émotionnel qu’elle suscite.

Tu ne sauras jamais…

Et puis finalement, la chanson des BB, portée par la voix de Patrick Bourgeois, gagne en profondeur et dévoilera toute sa portée. Mais pour le reste, je vous laisse le soin de découvrir son essence par vous-même.

Pourquoi ça ne plaira pas à tout le monde?

Tu ne sauras jamais, s’adresse à un public particulier, celui qui est prêt à s’engager dans un rythme cinématographique moins conventionnel. Ce genre requiert un spectateur disposé à embrasser la lenteur, à savourer la subtilité des longs plans et à se perdre dans la profondeur des silences. Ce n’est pas un cinéma fait pour la consommation rapide ou pour ceux qui recherchent l’action et les rebondissements constants. Il est plutôt destiné à ceux qui cherchent à contempler, à réfléchir et à expérimenter le film comme une forme d’art qui défie la perception habituelle du temps et de la narration.

Tu ne sauras jamais - Pourquoi ça ne plaira pas à tout le monde

Toutefois, il vous faudra vous armer de patience : Tu ne sauras jamais sera révélé au grand public le 15 mars 2024 uniquement.

Tu ne sauras jamais était présenté au Festival Cinemania en novembre 2023.

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Fiche technique

Titre original
Tu ne sauras jamais
Durée
109 minutes
Année
2023
Pays
Québec (Canada)
Réalisateur
Robin Aubert
Scénario
Robin Aubert et Julie Roy
Note
8 /10

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Fiche technique

Titre original
Tu ne sauras jamais
Durée
109 minutes
Année
2023
Pays
Québec (Canada)
Réalisateur
Robin Aubert
Scénario
Robin Aubert et Julie Roy
Note
8 /10

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