« Qu’est-ce que la dépendance affective? »
Fuir est tourné dans une maison pour femmes victimes de violence conjugale. C’est un film qui témoigne du courage de ces femmes qui, pour la plupart, témoignent à visage découvert. C’est une chronique avec ses hauts et ses bas, ses moments dramatiques et heureux, et au centre de laquelle se trouvent résidentes et intervenantes. L’action de Fuir se déroule sur plus de trois mois et nomme les blessures immenses des femmes violentées et la grande générosité de celles qui tentent de les réparer.
Comment définir la violence conjugale ? D’après le site quebec.ca, « lorsqu’il y a de la violence conjugale, les épisodes de violence sont répétés et un des partenaires prend le contrôle de l’autre et adopte des comportements nuisibles envers lui ».
Malheureusement régulièrement évoquée dans les médias, la violence conjugale, bien que subie par les deux sexes, touche les femmes en grande majorité.
Des maisons d’hébergement au Québec luttent contre ces événements dramatiques : parmi celles-ci, le centre dans lequel Carole Laganière a décidé de poser sa caméra afin de s’intéresser au quotidien des intervenantes et des résidentes.
Carole Laganière a déjà à son actif plusieurs œuvres documentaires et de fiction. Elle porte ce projet depuis des années et a souhaité évoquer à la fois les récits des violences subies, mais également les moments plus paisibles au sein de ce centre. Ces moments au cours desquelles les femmes parviennent à s’exprimer avec une écoute sans jugement de la part des intervenantes.
Le documentaire aborde quelques vécus de résidentes ainsi que leurs échanges avec les travailleuses sociales. En dehors du soutien psychologique, un accompagnement est apporté pour les démarches administratives et juridiques.
Non seulement ces femmes doivent apprendre à se reconstruire et restaurer leur propre estime, mais elles ont également à affronter la dure réalité du quotidien, accompagné parfois de menaces de leurs anciennes ou anciens conjoint.e.s. Aller de l’avant et retrouver confiance, parfois la peur au ventre et avec souvent peu de sécurité matérielle, tel est leur objectif éprouvant.
Parmi les résidentes du centre, nous pouvons citer Yzabel, Maude, Kate, Sophie, S. et K.
Comment réussir à se reconstruire au sein d’un présent angoissant et destructeur ?
Yzabel est une jeune femme résidente du centre, mère de deux enfants, qui semble assez solide au premier abord. Elle a travaillé longtemps à la SPCA, jusqu’à ce que son ex-conjoint l’empêche de travailler correctement. Elle s’est ensuite mise en couple avec son meilleur ami qui s’est avéré également violent. Il a fallu qu’elle use de stratégies afin d’éloigner ses enfants de cette violence quotidienne.
Très présente au sein du centre, elle s’exprime avec facilité et est proche de Maude, une autre jeune femme résidente.
L’angoisse est présente au sein de son quotidien et elle lutte pour retrouver confiance en elle, abîmée au cours des années auprès de ses anciens conjoints. Elle semble également lutter contre ses propres réactions mais démontre clairvoyance et volonté.
Maude est une autre jeune femme résidente, mère également, et qui a été victime de violences importantes de la part de son ancien conjoint, à la fois physiques et psychologiques. Elle est à l’écoute, clairvoyante et a déjà suivi plusieurs thérapies.
Au cours des entrevues, elle raconte avoir été « prise à la gorge un matin » et menacée de mort. Son conjoint s’excusait ensuite puis recommençait.
Dotée d’une belle force mentale et aidée par son nouveau conjoint, elle quittera le centre en tant que résidente après avoir accompli un long chemin de prise de conscience et de reconstruction.
S. est une femme résidente qui travaille dans le réseau de la santé. Alors qu’elle travaillait sur l’accompagnement des mères victimes de violence conjugale auprès d’intervenants en santé, elle en était elle-même victime. Il a été difficile pour elle d’accepter sa situation conjugale et de s’en défaire.
Parler, être accompagnée et écouter, (s’) accepter puis se prendre en main avec l’aide des intervenantes…
Le parcours est dur et éprouvant, d’autant plus lorsque, comme le font remarquer au cours du documentaire certaines travailleuses sociales, les personnes qui font preuve de violence se trouvent de nouveau proches des victimes.
Ainsi, ce documentaire frappe par son réalisme et la justesse de son propos. « Regagner la liberté » est le souhait de ces femmes, qui se rendent compte de la relation toxique qu’elles vivaient auprès de leurs anciennes et anciens conjoint.e.s. Les témoignages sont parfois glaçants, mais indispensables pour une aide juridique et psychologique.
Le site Québec.ca découpe « le cycle de la violence » en quatre phases : la tension, l’agression, la justification puis la réconciliation. Chaque fois que le cycle recommence, les victimes vont douter et progressivement perdre l’estime d’elles-mêmes. Une relation déséquilibrée s’installe peu à peu.
Comme le soulignent les résidentes, il est difficile de partir et d’affronter le problème… D’autant plus lorsque la confiance et l’estime sont à restaurer.
Ces femmes démontrent courage et résilience, notamment grâce à l’aide fondamentale apportée par les intervenantes qui accompagnent, recourent et œuvrent au quotidien afin de lutter contre cette violence dévastatrice.
Fuir pour retrouver la liberté : je recommande ce documentaire, fort et essentiel.
Bande-annonce
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