The art of un-war - une

The Art of Un-War — Les monuments détournés

« Rendre visible ce que le pouvoir rend invisible. »

The art of un-war - affiche

The Art of Un-War est une exploration approfondie de la vie de Wodiczko et des interventions artistiques qu’il crée comme réponses puissantes aux inégalités et aux horreurs de la guerre et de l’injustice. Tout au long du film, les interventions puissantes de l’artiste deviennent des exemples de la façon dont l’art peut être utilisé pour le changement social et pour la guérison.

Quelle valeur accordons-nous aux monuments? Sans fournir de réponse, Krzysztof Wodiczko parvient néanmoins à forcer une remise en question. 

Lors d’une visite au musée, mon approche de prédilection est la suivante : je regarde l’œuvre quelques instants, puis je consulte le cartel informatif qui l’accompagne pour finalement reprendre une distance afin de réinterpréter l’œuvre en considérant son contexte et l’intention de l’artiste. C’est une approche similaire à celle qu’adopte Maria Niro dans The Art of Un-War, elle présente d’abord les œuvres dépourvues de contexte, ce qui nous permet de formuler notre propre interprétation, puis des témoignages et des images d’archives viennent préciser son origine. 

La séquence d’ouverture composée d’esquisses dignes de Léonard De Vinci et de plans clairs obscurs installe ainsi un mystère qui se déploie lentement tout au long du récit. Dans un effet de boucle, la dernière séquence revient sur ces mêmes images qui ont accumulé au fil du récit de nouvelles couches de signification. 

L’art dans la vie, la vie dans l’art

Avant ce visionnement, je n’avais jamais entendu parler de Wodiczko. Je me réjouis que ce documentaire m’ait présenté cet artiste qui gagne à être connu. Sans tomber dans le piège de la biographie du « plus grand artiste méconnu », leitmotiv surexploité dans ce genre de portrait, la réalisatrice parvient à nous partager la démarche originale et la philosophie engagée de Wodiczko. Ce qui m’a d’abord séduit, c’est sa manière d’investir l’espace public et de détourner les monuments. Celui-ci incarne ainsi parfaitement le mouvement d’avant-garde qui vise à effacer la frontière entre la vie et l’art. En effet, en utilisant comme canevas des statues et des bâtiments puis en détournant leur sens à l’aide de projection, celui-ci parvient à puiser dans l’inconscient collectif pour mieux le remettre en question. 

L’intention et l’origine 

Je suis de ceux qui considèrent qu’une œuvre perd rapidement en sens et en profondeur lorsqu’on cherche à trop l’expliquer. Ce qui fait la force de l’art de Wodiczko, c’est que n’importe qui peut croiser par hasard une de ses œuvres et comprendre son message sans explication parallèle. Ainsi, les entrevues détaillant les intentions de l’artiste sont, selon moi, superflues. 

Par contre, ce qui m’intéresse plus, et ce que ce documentaire parvient à exposer efficacement, c’est l’origine de la démarche de l’artiste. On apprend ainsi que la guerre a suivi Krzysztof Wodiczko toute sa vie. Né en 1943 en Pologne, d’une mère juive, ses premières années auront sans doute été déterminantes pour sa philosophie anti-guerre. On peut également dire que le régime répressif dans lequel il a grandi l’a forcé à faire preuve de créativité pour passer ses messages, se distanciant ainsi d’une représentation plus littérale pour favoriser une ambiguïté qui porte à la réflexion. 

The art of un-war - Intention et origine
La structure métallique autour de l’Arc de triomphe

Afin de survoler l’ensemble de la carrière de l’artiste, les cinéastes sont allés aux quatre coins de la terre : États-Unis, France, Canada, Japon et Corée du Sud. Ce projet à grand déploiement est par contre victime de son ambition, comme en témoignent des lacunes qui nuisent à son ensemble. La plus dérangeante est la qualité sonore inégale des séquences d’entrevues. À certains moments, la voix caverneuse et déformée des intervenants trahit l’utilisation excessive du denoiser (outil de traitement sonore permettant de réduire le bruit ambiant sur des dialogues). 

À quoi servent les monuments? 

Au-delà de la sagesse de l’artiste, on y voit également son ambition quasi irréaliste. L’exemple le plus probant est son projet de bâtir une structure métallique autour de l’Arc de triomphe afin d’en dénoncer le message. À la base, ce monument représente l’idée selon laquelle pour arriver à la paix, il faut passer par la guerre. On comprend donc l’intérêt de questionner cette vision problématique, mais concrètement, les Français sont-ils prêts à défigurer leur icône? Ceci pose également une question plus large : Quelle valeur accordons-nous au monument? Une valeur architecturale? Symbolique? Historique? C’est une question qui revient constamment dans l’actualité, notamment chez nos voisins du Sud avec les statues confédérées et, plus récemment, dans les pays de l’ex-URSS où trônent encore des monuments du régime déchu. Sans fournir de réponse, Krzysztof Wodiczko parvient néanmoins à forcer une remise en question. 

Bande-annonce  

Fiche technique

Titre original
The Art of Un-War
Durée
62 minutes
Année
2022
Pays
États-Unis
Réalisateur
Maria Niro
Scénario
Maria Niro
Note
6.5 /10

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Fiche technique

Titre original
The Art of Un-War
Durée
62 minutes
Année
2022
Pays
États-Unis
Réalisateur
Maria Niro
Scénario
Maria Niro
Note
6.5 /10

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