« You made the impossible seem possibe, in a segregated North America, by showing everybody a glimpse of what everyday life could be like: black and white people living side by side. »
[Tu as rendu l’impossible possible, dans une Amérique du Nord ségréguée, en montrant à tous un aperçu de ce que pourrait être la vie quotidienne : des Noirs et des Blancs vivant côte à côte.]
1946, à Montréal, les Dodgers de Brooklyn ont un club-école qui s’appelle les Royaux. En 1946 se produit un événement qui révolutionna le baseball majeur : un Noir est admis dans l’équipe montréalaise. Jackie Robinson va jouer au baseball avec les Blancs.
Dear Jackie (Cher Jackie), un film ironiquement en noir et blanc, raconte l’apport considérable que l’arrivée de Jackie Robinson aurait apporté à la communauté Noire de Montréal et d’ailleurs en Amérique.
Mais très rapidement, le document impose un constat : les Montréalais se sont aussitôt pété les bretelles, se targuant d’être une société post-raciste, du fait d’avoir intégré un joueur de baseball de race noire dans leur équipe.
Je m’étais réjoui d’avoir à commenter un film sur mon sport préféré, mais ce film traite de racisme, pas de baseball!
Je dois dire d’emblée que ce documentaire est assez exceptionnel par son contenu et son ton. Le réalisateur nous fait rencontrer des personnes merveilleuses, ayant subi des actes de ségrégation raciale, enfants comme adultes et pas dans l’Amérique profonde, mais plutôt ici, à Montréal. Un long plaidoyer pour dénoncer les abus faits aux Noirs à Montréal.
La Petite Bourgogne est devenue le quartier noir de Montréal dans les années 30 et 40. Et même avant, déjà en 1919, existait le Club des femmes de couleur. Le vocabulaire de l’époque employait souvent le mot Négro comme dans negro player autant pour la musique que pour le sport. Depuis, le quartier a été démoli à 70% pour faire place surtout à l’autoroute Ville-Marie. On arrête des travaux pour sauver une famille de grenouilles, mais pas un quartier de Noirs… Le centre communautaire a aussi été démoli et des manifestations ont lieu pour sa reconstruction.
« Mon père faisait des blagues et c’est pour ça qu’on était heureux. »
Cette citation donne pas mal le ton au contenu du film, en ce sens que malgré les innombrables événements racistes racontés, la communauté Noire de Montréal a survécu par l’entraide, la musique et la solidarité.
L’entraide est évidente du fait d’une proximité des familles dans le même quartier. On peut facilement qualifier l’endroit de ghetto, mais le film nous fait bien comprendre la nécessité de cette proximité.
Puis, on décrit aussi les belles années des boîtes de nuit de Montréal, les Oscar Peterson, les Oliver Jones, aussi, les artistes de passage comme la grande Ella Fitzgerald et Dizzy Gillespie (spectacle au Rising Sun sur Saint-Antoine auquel j’ai assisté en 1980).
J’ai trouvé ce film honnête, en ce sens qu’il veut visiblement nous faire sentir la misère humaine de la communauté Noire depuis des décennies en incluant maintenant, mais nous montre aussi la force, le talent et l’humour de ces braves gens. On danse à claquettes, on joue des instruments, on montre celui qui a été le plus rapide au Canada en course à pied.
L’injustice est bien illustrée et racontée : les hommes Noirs qui travaillaient pour le Canadien Pacifique à l’époque n’étaient toujours que des porteurs, jamais de poste plus intéressant. Des arrestations par centaines effectuées par les policiers de Montréal, simplement parce que la peau n’est pas de la bonne couleur, puis relâchés au poste. Des bras cassés, aussi, cette jeune femme qui a voulu s’interposer lors de l’arrestation d’un ami vit depuis avec une plaque et des vis dans son corps et une douleur permanente.
« Le racisme n’est pas agréable du tout! »
Des petites choses pour nous, les Blancs, mais qui font mal aux Noirs, aussi banales que les réglisses noires que l’on appelle des négresses.
La visite de Nelson Mandela à l’église Union Unie est bien soulignée. Ils se font tuer et continuent à chanter la gloire de Dieu.
Alors donc, Jackie Robinson a eu le privilège d’être accueilli en héros par les Blancs, mais c’est parce qu’il était bon, un des meilleurs. Mais il a quand même tracé la voie à une certaine ouverture d’esprit pour les générations futures. Ce film nous montre par contre qu’il y a toujours beaucoup de chemin à faire pour atteindre l’égalité des droits pour tous.
Le film est offert en deux versions originales : avec une narration en anglais, sous-titré en français; et avec une narration en français, sous-titré en anglais.
Ah oui… À voir pour remettre en question le profilage racial, M Legault.
Bande-annonce
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