Animal - une

Animal — Un voyage écologique

« Il faut qu’on agisse en se considérant comme des animaux. »

Animal - Affiche

Bella et Vipulan ont 16 ans, une génération persuadée que leur avenir est menacé. Changement climatique, 6e extinction de masse des espèces… d’ici 50 ans leur monde pourrait devenir inhabitable.

Qui de mieux que des jeunes à la fois lucides et naïfs, déchirés entre l’anxiété et l’espoir, pour défendre cette cause? 

Le 4 avril 2022, le nouveau rapport du GIEC réitère l’urgence de réduire nos émissions de gaz à effets de serre pour ralentir le réchauffement climatique. Comme nous en sommes tous conscients depuis plusieurs années, les engagements des gouvernements sont loin d’être suffisants pour limiter la crise climatique qui nous attend. D’autant plus que la majorité des cibles de réduction approuvées lors des accords sur le climat n’ont jamais été atteintes. 

Face à un enjeu aussi inquiétant, les réactions individuelles varient : écoanxiété, engagement, désensibilisation, évitement, cynisme, accélérationnisme, etc. Au-delà de l’individu par contre, la masse peut se mobiliser pour les mouvements sociaux et les changements idéologiques. Quel rôle l’art peut jouer pour contribuer à cette cause? Le documentaire est reconnu pour sa capacité d’informer et de mobiliser, il paraît donc comme un outil idéal pour rallier les gens derrière cet enjeu. Par contre, on se doit de questionner l’impact réel qu’il peut avoir en abordant un sujet maintes fois traité, comme c’est le cas de l’écologie. Pour éviter de devenir un élément parmi tant d’autres du discours ambiant, la proposition se doit d’être audacieuse, inusitée.

Celle que Cyril Dion nous offre avec son nouveau documentaire Animal a le potentiel de l’être: retourner à la racine de notre relation à la nature et aux animaux pour déconstruire notre approche anthropocentriste. Ce n’est pas la première fois qu’il aborde cet enjeu, les plus familiers avec les documentaires écologiques se souviendront de Demain, un projet coréalisé avec Mélanie Laurent qui leur a valu le césar du meilleur documentaire en 2016. Il a surtout retenu l’attention pour son approche humaniste et relativement optimiste de l’avenir. Deux ans après, les cinéastes s’intéressent aux initiatives nées du premier projet dans Après Demain.

Adolescent(e)s engagés 

Afin de mieux comprendre les causes de la 6e extinction de masse, Animal segmente l’enjeu: le plastique dans les océans, la perte d’habitat, la surpêche, l’agriculture, etc. Des problématiques qui ont déjà été abordées maintes fois sous plusieurs formes. Par contre, ce documentaire se distingue par son moteur narratif, l’histoire étant propulsée par deux adolescent(e)s engagés dans la cause. On ne peut s’empêcher ici de penser à la figure de proue de l’activisme écologique de ces dernières années, Greta Thunberg. Pourquoi ces jeunes deviennent-ils des piliers aussi importants dans ce mouvement? Comme les deux protagonistes de ce documentaire, Bela Lack et Vipulan Puvaneswaran, le mentionnent, leur génération sera la première à vivre pleinement les conséquences des changements climatiques. De plus, puisque les preuves et les études amenées par les experts ne sont malheureusement pas suffisantes pour imposer un changement, il faut laisser les chiffres de côté pour puiser dans ce qui nous touche et nous mobilise systématiquement : l’empathie. Qui de mieux alors que des jeunes à la fois lucides et naïfs, déchirés entre l’anxiété et l’espoir, pour défendre cette cause? 

Animal - Adolescents engagés

Pour les amener à mieux comprendre les causes de la 6e extinction, Animal envoie Bela et Vipulan dans un long voyage parsemé de rencontres. Les personnes qu’ils apprennent à connaître ont des savoirs et croyances variés, mais elles ont toutes un peu de sagesse à leur partager. Ainsi, on assiste à la progression idéologique de ces deux jeunes qui, malgré leur ambition et leur intelligence, en ont encore à apprendre. Par exemple, au début du projet, l’engagement de Bela se manifeste dans une forme de misanthropie qui, au cours des rencontres, semble se dissiper. 

Une des forces de ce documentaire est la transparence et l’honnêteté de sa démarche. On aborde par exemple l’hypocrisie de voyager pour un documentaire écologique et le sentiment de déresponsabilisation ou de « devoir accompli » que peut engendrer l’activisme. Par contre, le moteur narratif devient parfois un peu artificiel. Par exemple, lorsque les jeunes posent des questions naïves dont la réponse s’adresse clairement plus aux spectateurs qu’à eux. Ceci n’empêche pas pour autant à des moments documentaires forts de prendre vie, comme lorsqu’ils suivent un bureaucrate impliqué dans la pêche en eaux profondes en le bombardant de questions dans un acharnement digne de Michael Moore. 

Humanisme, cynisme, anthropocentrisme 

Même si un point de vue humaniste est toujours préférable au cynisme, il entre parfois en contradiction avec la prémisse initiale qui se veut anti-spéciste. En effet, même si le film propose un rapport plus respectueux et symbiotique avec le royaume animal, il s’attarde plus aux êtres humains qu’à la faune. Mis à part le discours de Jane Goodall sur nos similitudes émotives et sociales avec les chimpanzés ou un fermier qui mentionne que chaque vache à sa propre personnalité, on ne semble pas considérer leur valeur inhérente, au-delà du filtre anthropocentriste.Pour mesurer la réussite d’un documentaire engagé, la question essentielle est: comment ce film contribue-t-il à la cause? La grande réussite de Demain était dans ses propositions à petites échelles et accessibles qui nous laissaient l’impression de pouvoir contribuer concrètement à la cause. On ne peut malheureusement pas en dire autant pour Animal, les enjeux abordés étant tellement grands et complexes qu’on en ressort avec un sentiment d’impuissance plus qu’un désir de s’engager. Par contre, par son efficacité de vulgarisation et son esthétique léchée, Animal est un documentaire accessible qui a le potentiel de rallier un public plus large à la cause.

Bande-annonce  

Fiche technique

Titre original
Animal
Durée
105 minutes
Année
2021
Pays
France
Réalisateur
Cyril Dion
Scénario
Cyril Dion et Walter Bouvais
Note
6.5 /10

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Fiche technique

Titre original
Animal
Durée
105 minutes
Année
2021
Pays
France
Réalisateur
Cyril Dion
Scénario
Cyril Dion et Walter Bouvais
Note
6.5 /10

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