Vendredi, j’étais au Cinéma du Musée pour la soirée de lancement de la programmation des fêtes. Une soirée lors de laquelle étaient présentés 3 courts métrages. Je vous raconte ça!
C’est à 19h que ma collègue et moi arrivons au Cinéma du Musée. Premier constat, c’est calme dehors. Mais il fait froid. On verra à l’intérieur.
À l’intérieur, il y en a du monde. Mais ne soyez pas inquiets, les masques étaient aussi au rendez-vous. Par contre, grande déception de mon côté : il n’y a pas de boissons offertes. 😉
Donc on attend et à 19h26, on rentre dans la salle. Petite présentation par la dame de Filmoption International qui introduit Jean-François Chicoine et Benoît Brière. C’est là qu’on réalise que la soirée à des aires de réunions de famille. Le quart de la salle semble occupé par des Chicoine et des Brière.
Les deux hommes présentent leur film sur un ton teinté d’humour. Après tout, il s’agit de Benoît Brière. Mais, c’est tout en fait dans le ton du film, puisque malgré le sujet lourd (les soins de fin de vie), le film offre tout de même des moments qui font sourires, voire rires.
Puis, il y a le film, suivi d’une petite période de questions qui, malheureusement, ressemble surtout à un moment familial où « matante chose » dit qu’elle est donc fière de son neveu et où l’autre « matante » dit que le personnage de la mère ressemble tellement à ce qu’était la vraie dame… Mais au final, il s’agit d’un beau moment, succédant deux autres magnifiques films pour lesquels aucun membre de l’équipe n’était présent.
Mais trêve de placotage, voici ma critique de chacun des films présentés.
Luc (Marcelle Sabourin), pédiatre et professeur octogénaire à la retraite, vit avec François (Benoît Brière) son fils, pédiatre comme son père, et l’épouse de François, Esther (Élise Guilbault). Souffrant, diminué physiquement, le vieux a maintenant décidé d’en finir avec la vie.
C’est dans une joute verbale corrosive et sensible, que Brière et Sabourin s’affrontent afin de montrer les enjeux émotifs en liens avec l’aide à mourir. Sans réellement prendre position pour ou contre, le film montre qu’au-delà de la vie et de la mort, il y a des sentiments et des émotions qui entrent en jeu.
Mais ici, le paternel ne se contente pas de demander l’aide à mourir. Il demande à son fils d’achever ses jours, dans l’intimité de sa maison. Le fils l’entraine alors dans une petite virée existentielle dans les rues de Montréal. Un voyage qui se terminera à la porte d’un centre hospitalier, où Luc sera confronté à son ultime volonté : le choix entre la finalité d’une aide médicale à mourir ou un retour à la maison pour accepter les petits bonheurs qui lui restent à vivre.
Je me dois de mentionner le génial de situer ce film à la veille de Noël. Quelle belle analogie que de mettre la mort en opposition à ce qui représente la vie. Et quoi de plus tragique qu’un décès à Noël? Vraiment un film à voir à l’approche de cette période de l’année qui représente tant de choses pour tout un chacun.
Note : 9/10
Fiche technique
Titre original : Mourir en vie
Durée : 35 minutes
Année : 2021
Pays : Québec (Canada)
Réalisateur : Benoît Brière
Scénario : Jean-François Chicoine
Après un an d’absence, Chantale (Ève Saint-Louis), qui étudie désormais à Paris, décide de rentrer à Québec, chez sa mère, pour y passer les fêtes de fin d’année. Contre toute attente, son père (Claude Laroche), avec qui elle a une relation tumultueuse, propose de venir la chercher à l’aéroport de Montréal pour qu’ils fassent le chemin ensemble. Hésitant à le revoir, elle accepte tout de même sa proposition.
La Traversée, c’est l’histoire des retrouvailles entre une femme et son père dans un trajet parsemé d’obstacles où rien ne se déroulera comme prévu. La réalisatrice (et actrice) réussit à montrer que ce n’est pas parce qu’il y a un lien familial qu’il n’y a pas un grand malaise entre deux personnes. Entre Chantale et son père, il n’y a clairement aucune intimité, et rien ne les unit si ce n’est le sang.
Elle utilise des lieux familiers et banals pour montrer à quel point ce qui devrait être confortable peut être totalement à l’opposé. L’utilisation de la longue et interminable route devient un prétexte pour traiter du malaise qui unit ses personnages. Par moment, le film prend des airs de suspense alors qu’on se demande si le père ne représente pas un danger réel pour sa fille.
Au final, Chantale sera confrontée à l’emprise que son père a sur elle et devra agir. Et pour la jeune réalisatrice, il s’agit d’une première œuvre réussie.
Note : 9/10
Fiche technique
Titre original : La traversée
Durée : 22 minutes
Année : 2020
Pays : Québec (Canada)
Réalisateur : Ève Saint-Louis
Scénario : Ève Saint-Louis
Une femme (Tilda Swinton) regarde le temps passer à côté des valises de son ex-amant (qui est censé venir les chercher, mais n’arrive jamais) et d’un chien agité qui ne comprend pas que son maître l’ait abandonné. Deux êtres vivants face à l’abandon.
Avec The Human Voice, Almodóvar boucle la boucle de sa passion pour la pièce de Cocteau. Il avait introduit des éléments de cette pièce dans Women On the Verge Of Nervous Breakdown et Law of Desire, mais c’est la première fois qu’il en fait l’adaptation à proprement parler.
Ce court métrage est un petit bijou que nous offre ce grand réalisateur. Avec Almodóvar, on ne sait jamais si on se retrouvera dans une comédie absurde (Les amants passagers) ou dans un drame poignant (Parle avec elle). Hé bien ici, il nous amène encore ailleurs. Et il offre à Tilda Swinton l’occasion de montrer tout son talent.
Pendant son attente de 3 jours, son personnage passe par toute sorte d’humeur, de l’impuissance au désespoir en passant par la perte totale de contrôle. La voix humaine (The human voice) est la sienne, on n’entend jamais la voix de son amant. Au début, elle fait semblant d’agir normalement et calmement, mais elle est toujours sur le point d’exploser face à l’hypocrisie et à la méchanceté de l’homme. Ce film est une leçon de morale sur le désir, même si son protagoniste est au bord même de l’abîme. Le risque est une part essentielle de l’aventure de vivre et d’aimer. La douleur est très présente dans le monologue.
Mais il n’y a pas que la performance magistrale de l’actrice qui fait de ce film un petit chef-d’œuvre. Le réalisateur prend des risques qui paient. Un peu comme l’avait fait Von Trier avec Dogville, Almodóvar introduit des éléments du théâtre à l’intérieur des murs du cinéma. Il s’offre le luxe de montrer ce qu’on appelle, au théâtre, le quatrième mur. Autrement dit, il déséquilibre le spectateur en montrant la structure en bois qui soutient les murs et le décor qui se veut réaliste, donc la réalité matérielle de ce qui est fictif.
En montrant des éléments de décor, le réalisateur accentue le sentiment de solitude ressenti par la femme.
Pour les connaisseurs d’Almodóvar, il y a quelques éléments du film qui soulèveront les passions. En effet, le réalisateur espagnol se fait un hommage (oui, oui, à lui-même) en intégrant une bande originale composée de thèmes de Étreintes brisées, La mauvaise éducation et Parle avec elle, revisités pour ce film.
Il s’agit là d’un autre film à ne pas manquer.
Note : 9.5/10
Fiche technique
Titre original : The Human Voice
Durée : 30 minutes
Année : 2020
Pays : Espagne
Réalisateur : Pedro Almodóvar
Scénario : Pedro Almodóvar
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