« Ce texte est moins un chant qu’une prière. »
Mélisande, Ilan et Matteo, la vingtaine, passent leurs vacances à Martigues. Ils rencontrent Solène, une jeune Parisienne en villégiature dans la région. Un soir de promenade, ils font au creux des collines une découverte qui les plonge dans une inquiétude sourde…
Avec La colline, Julien Chauzit propose un film qui joue avec certains codes du film de genre pour provoquer et capter un processus de conscientisation et de politisation.
Voulant éviter une narration trop classique afin de composer un film de vacances qui repose sur des ambiances davantage que sur une intrigue, le réalisateur a décidé d’utiliser l’improvisation. Pas de dialogues pour les acteurs, mais seulement des situations. Puis, on les laisse aller.
Ce choix n’est pas innocent. Il rejoint la thématique de base du film, qui est : les vacances. Donc, comme c’est souvent le cas pour les vacances, les personnages (et les acteurs) avancent sans trop savoir où ils vont, au gré des humeurs, des rencontres et de la météo. Le réalisateur explique : « Il s’agissait d’écrire à partir du réel. Pour ce faire, je suis parti d’un territoire, j’en ai référencé les lieux qui m’inspiraient au regard des enjeux du film, et y ai rencontré des gens à qui j’ai proposé de participer à l’aventure. Au tournage, nous n’avions qu’un séquencier qui mentionnait ces lieux et ces personnes, et quelques éléments narratifs. Le but était de documenter la vie d’un groupe à l’épreuve d’un territoire et de rencontres, puis d’en observer le mouvement intérieur. À partir de cette matière touffue, le montage a représenté un considérable travail d’écriture. » J’imagine effectivement que le montage ait dû être tout un défi afin de créer une trame au film. Et je dois ajouter que c’est totalement réussi.
Mais est-ce toujours un documentaire? La question se pose. Mais au final, on peut dire que le sujet est traité de façon documentaire. Parce que le réel sujet du film, c’est la destruction de l’environnement.
De par les rencontres que font les personnages, La colline devient politique. On passe éventuellement d’un simple film de vacances, à un film qui questionne la destruction de l’environnement et de la santé des habitants d’une petite ville, en échange d’emplois. Et bien que le réalisateur — et les personnages — prenne position, on ne sent pas de jugement. On nous présente les points de vue des résidents de Martigues et, surtout, on comprend pourquoi ils acceptent la présence des ces pollueurs dérangeurs.
Au fur et à mesure que le film avance, on assiste à une prise de conscience écologique de quatre jeunes adultes et à la trajectoire d’un éveil politique. Le tout mènera à une belle séquence lors de laquelle 2 des personnages feront un rap engagé. Parce qu’une fois que la roue est lancée, et que la conscientisation est commencée, il est difficile de rester les bras croisés à regarder la vie se faire détruire…
En utilisant une technique dans laquelle les acteurs avaient à vivre les situations et les rencontres à l’aveugle — ces dernières ne leur étant révélées qu’au dernier moment — on se retrouve dans un film qui marche sur la fine ligne entre documentaire et fiction.
C’est donc grâce à ces interactions humaines réelles que Chauzit crée une œuvre où le documentaire et la fiction se contaminent à tour de rôle. Ainsi, il révèle les interrogations et les inquiétudes d’une population prise en étau entre ses besoins économiques et les impacts négatifs sur l’environnement et la santé d’une industrie néfaste.
Note : 8.5/10
La colline est présenté aux RIDM, sur place le 16 et en ligne du 18 au 21 novembre 2021.
Bande-annonce
Titre original : La colline
Durée : 76 minutes
Année : 2021
Pays : France
Réalisateur : Julien Chauzit
Scénario : Julien Chauzit
© 2023 Le petit septième