« No one escapes the Ghostland »
[Personne ne sort du Ghostland]
Dans la ville frontière perfide de Samurai Town, Hero, un voleur de banque (Nicolas Cage) impitoyable est sorti de prison par le Gouverneur (Bill Moseley), un riche seigneur de guerre dont la petite-fille adoptive Bernice (Sofia Boutella) a disparu. Le Gouverneur offre au prisonnier sa liberté en échange de la récupération de la disparue. Enfermé dans une combinaison de cuir qui s’autodétruira dans les cinq jours, le bandit part en voyage à la recherche de la jeune femme et de son propre chemin vers la rédemption.
Prisoners of the Ghostland est le premier long-métrage en anglais du prolifique réalisateur japonais Sion Sono, qui, en 2015, a sorti pas moins de six films en un an. Vous l’avez peut-être remarqué avec sa série horrifique et complètement délurée : Tokyo Vampire Hotel disponible en visionnement sur Amazon Prime Vidéo ou encore The forest of Love sur Netflix. Sion Sono adore mélanger des éléments de westerns, de films de samouraï et de films d’action postapocalyptiques avec une légère pointe de folie. Lors d’une entrevue, il ajoute : J’ai créé le « quand l’Est rencontre l’Ouest », un monde qui n’existe nulle part ailleurs. Mais ce que je voulais vraiment créer derrière tout ça c’est la distorsion de la société moderne rendant réel le monde irréel. Je crois que nous vivons dans un monde irrationnel. Les irrationalités que nous ressentons tous les jours sont saupoudrées dans ce film d’action western samouraï.
Pas surprenant, donc, que Nicolas Cage décide d’embarquer encore une fois dans le rôle de justicier anticonformiste qui frôle l’irrationnel. Dernièrement, à travers les différentes productions qui se sont démarquées de la masse, on constate que le travail de Cage est devenu un genre en soi, grâce, entre autres aux succès cultes de Mandy de Panos Cosmatos (2018) et Color Out of Space de Richard Stanley (2019) qui ont définitivement marqué les esprits des adeptes du cinéma de genre. En passant de blockbusters hollywoodiens à des productions indépendantes, Cage n’a rien perdu de sa carrure, de sa présence ni de son jeu, surtout ici, où on le retrouve vêtu d’une belle combinaison en cuir pleine d’explosifs. Jusqu’ici tout va bien, à première vue, c’est un match parfait.
Dans ce monde postapocalyptique un brin dérangeant, il faut reconnaître que l’esthétisme de son univers cinématographique est très bien développé. Sono puise dans une variété d’inspirations qui mélangent le style western et la culture japonaise, ce qui crée un visuel particulièrement audacieux et plutôt sinistre. On y retrouve des shérifs coiffés de chapeaux de cow-boy, des fantômes vengeurs, des gangsters sans aucun code qui se mêlent à des ronin excentriques. Il y a également Ghosland (le pays fantôme), une ville désertique et dystopique inspirée de Mad Max qui incarne le symbole d’un avenir sans espoir, dont les habitants ont survécu à une catastrophe nucléaire (rien que ça). Ils ont su réapprendre à vivre dans un univers étrange et déconcertant où le temps est contraint de s’arrêter. Néanmoins, cette tribu obéit à un culte qui transforme les humains en mannequins et qui se bat pour empêcher les mains d’une horloge géante de bouger. (C’est là que ça devient croustillant). Rajoutez également l’aspect chanté des comédies musicales dans certains passages du film. (Là, vous ne pourrez pas dire que je ne vous ai pas prévenu).
Cependant, le scénario d’Aaron Hendry et Reza Sixo Safai ne parvient jamais vraiment à s’élever comme il le devrait. Le récit est à la fois sous-développé et surexpliqué. Il y a de nombreux flashbacks et des séquences de rêves qui ne servent qu’à compliquer un peu plus l’histoire. La quête principale (qui est de retrouver Bernice) arrive rapidement à son dénouement pour laisser place à d’autres rebondissements pas toujours bien définis.
Effectivement, même s’il existe de nombreux films de genre où le récit n’est qu’une excuse pour tourner des scènes d’action quelque peu sympathiques, il faut reconnaître qu’ici, le film perd un peu de sa saveur quand on s’attarde trop longtemps sur la trame narrative. Regarder Nicolas Cage se faire exploser un testicule dans une combinaison en cuir moulante tout en combattant des samouraïs, des cow-boys et des zombies toxiques semble plutôt convivial et bienveillant, mais Prisoners of the Ghostland ne nous en donne pas assez, hélas.
En revanche, c’est une bonne introduction pour découvrir l’univers de Sion Sono. Il faut bien sûr apprécier les œuvres saugrenues, violentes, acidulées avec un goût prononcé pour la provocation et la subversivité en générale, le tout, saupoudré d’une petite touche Kawaii.
Bande annonce de Tokyo Vampire Hotel (Amazon Prime)
Prisoners of the Ghostland a été présenté le 20 et le 23 août dernier en avant-première dans le cadre du festival Fantasia à Montréal. Il s’apprête à sortir en salle, dès aujourd’hui.
Note : 5,5 /10
Bande-annonce
Titre original : Prisoners of the Ghostland
Durée : 1h43
Année : 2021
Pays : USA
Réalisateur : Sion Sono
Scénario : Aaron Hendry; Reza Sixo Safai
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