« Qu’est-ce qui se passe? On dirait que tu as vu le diable. »
L’existence de Dave (Tom Vermeir) est sans espoir. Ses jours et ses nuits se confondent alors qu’il erre vaguement dans les couloirs de l’hôtel Poséidon, abandonné et délabré, dont il a hérité de son père décédé. Lorsqu’une jeune femme (Anneke Sluiters) frappe à la porte de l’hôtel à la recherche d’une chambre, tandis que le meilleur ami de Dave veut organiser une fête dans l’arrière-boutique et qu’un rêve récurrent le hante, une épreuve surréaliste et macabre se déclenche.
Avec Hotel Poseidon, Stef Lernous entraîne le spectateur dans un univers étrange, surréaliste et lynchien. Une aventure digne de Fantasia, qui va du dégoutant au macabre.
Pour son premier long métrage, Lernous ne se contente pas d’un simple film de genre. Hotel Poseidon est, en quelque sorte, divisé en deux par son style.
Une première partie, qui dure une trentaine de minutes, dans laquelle on découvre un univers dégoutant, qui lève le cœur. Chose assez rare, le film a réussi à me faire lâcher quelques exclamations de dégoût. Et ce n’est pas rien. La dernière fois que j’avais ressenti ce genre de sentiment, c’était en regardant Grave (Raw).
La deuxième partie du film nous entraîne plutôt dans cet univers glauque et cauchemardesque qui pourrait rappeler David Lynch ou encore David Cronenberg. Pour créer cet univers sale et sombre où les fusibles sautent et les quelques lumières à l’intérieur tombent régulièrement en panne, le réalisateur a travaillé avec autant d’éclairage pratique que possible à l’intérieure même du décor : appliques murales, projecteurs lors de la fête, lampes fluorescentes vacillantes au-dessus des tables, lumières de fours, d’aquariums et de réfrigérateurs. Toute cette lumière froide donne aux visages un aspect dur et fantômesque.
Alors que de curieux personnages occupent les chambres et les couloirs de l’hôtel, on se retrouve dans un univers onirique empreint d’un surréalisme grotesque : un style empreint de l’ADN artistique belge, et surtout flamand. Je pense, entre autres, à certains peintres de la renaissance flamande, ou encore à ce court métrage exceptionnel que j’ai vu lors du festival d’Annecy.
En termes de personnages étranges, le réalisateur n’a pas lésiné sur la quantité, ni sur la qualité. Plusieurs sont dignes d’un trip d’acide. Lernous les décrit ainsi : « Dave braves all the horrors of what I call Flemish gothic: the awful girlfriend, the dominant mother, the repulsive “friends” Tuur and Jacki, etc. » [Dave brave toutes les horreurs de ce que j’appelle le gothique flamand : l’horrible petite amie, la mère dominante, les « amis » repoussants Tuur et Jacki, etc.]
Parmi les hystériques, il y a la mère de Dave (Tania Van der Sanden) et la petite amie qui sont assez mémorables. Elles sont toutes deux dignes de Wild at Heart de Lynch.
Hotel Poseidon est une histoire non conventionnelle, à la limite du surréaliste et parfois du fantastique. Le film évite les règles narratives conventionnelles au profit de la logique interne et énigmatique d’un cauchemar. Et quel cauchemar!
Je vous invite donc à profiter de Fantasia pour assister à une journée dans la vie de Dave — un homme troublé par les cauchemars, son voisin, ses amis et son amour.
Note : 8.5/10
Hotel Poseidon est présenté au festival Fantasia les 10 et 12 août 2021.
Bande-annonce
Titre original : Hotel Poseidon
Durée : 90 minutes
Année : 2021
Pays : Belgique (Flandre)
Réalisateur : Stef Lernous
Scénario : Stef Lernous
© 2023 Le petit septième