Ça lui prend d’un coup à 40 ans : Frédéric veut un bébé. Claire elle n’en a jamais voulu et ils étaient bien d’accord là-dessus. Il commet l’impardonnable et lui fait un enfant dans le dos. Claire se transforme en baleine et Frédéric devient gnangnan.
Sophie Letourneur n’avait visiblement pas le projet de faire un grand film avec Énorme, ni un gagnant aux Oscar. Il semble qu’elle avait plutôt le goût de s’amuser et d’amuser son public.
Elle nous présente deux personnages très inégalement complémentaires, liés par le talent de Claire comme pianiste. Frédéric voit à tout, de la prise de pilule au transport de valises pour Claire. Il est les bras, les yeux et les jambes de sa compagne. Il devient Claire Girard, mais sans le talent dont elle continue à se charger.
Lors de leurs nombreux déplacements, New York, Tokyo, Paris, etc, il parle même pour elle, il est Claire Girard pour toutes les réservations et engagements. Claire est une personne éteinte, qui se met en fonctionnement seulement devant un piano. On verra aussi par la suite comment elle est absente de sa grossesse. Ainsi, il devient normal qu’il décide de faire un enfant à Claire sans qu’elle ne le sache. « Tu m’as fait un bébé dans le dos », lui dira-t-elle plus tard, mais sans éclat, sans grand reproche.
L’idée n’est pas neuve, le film Québécois Maman last call en 2005 avait présenté le même scénario d’un gars qui remplace les pilules anticonceptionnelles de sa blonde par des bonbons pour qu’elle tombe enceinte…
Ici, toute l’action devient un genre de démonstration des trouvailles de Frédéric pour arriver à ses fins. Les visites au chaman de leur immeuble tentent d’apporter un côté un peu mystique au film sans grande conviction. Idée assez originale; lorsque Claire est fatiguée, Frédéric lui demande : « tu veux que je te détendes? » Et lui fait un cunilingus… Frédéric prend tout en charge… même les cours prénataux! Qu’il prend… seul!
Contrairement au film québécois cité plus haut, il n’y a aucune mention de l’aspect légal dans la situation. En cette époque du #Metoo, en ces temps où le mâle marche sur des œufs quand il est question des femmes, ce scénario ne manque pas d’audace, d’autant plus réalisé par une femme. On dirait qu’elle a voulu nous montrer comment les hommes se sentent et qu’ils existent encore, ayant plein droit à la décision de devenir père. Mais de là à ne pas en parler à la future mère…
À la limite, on pourrait croire davantage à cette histoire si la réalisatrice l’avait placée en 1970, tellement la femme (Claire) est passive, ne prend pas son droit au chapitre, sauf un très timide « C’est moi qui décide… » vers la fin de la grossesse. Mais le film se déroule maintenant, en 2019…
Si on veut trouver du positif, on pourrait suggérer qu’Énorme souhaite encourager Claire – et les femmes – à prendre sa place. Ironiquement, elle prend plutôt du volume…
À mon avis, le film dérape sur cette scène où Claire est en clinique et que son ventre gonfle sous nos yeux devenant ÉNORME. C’est une farce, une allégorie, un cauchemar? Mais non, elle prend réellement le double ou le triple de volume instantanément. Seule sa bedaine peut jouer du piano, ses mains ne rejoignent plus les touches… elle est ÉNORME!
Puis vient la scène de l’accouchement : interminable.
Mis à part les scènes de concert, les Chopin et Ravel qui sont bien rendus, ce film qui se veut une comédie ne m’a pas fait rire, et m’a plutôt déçu malgré deux comédiens qui jouent bien leur rôle mais qui sont confinés à l’intérieur d’une histoire pas originale et où la vedette est une bedaine surdimensionnée!
Une idée personnelle qui, mise en film, ne donne pas le résultat escompté.
6/10
Bande-annonce
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