« Je me sens coupable de vouloir partir. Mais en même temps, on a vite fait le tour de ce qu’on peut faire ici. »
– Ethan Nadeau
À l’extrémité Est du Québec, d’anciens villages de pêche se battent pour leur survie. Alors que les adolescents rêvent de quitter la région en quête d’un avenir meilleur, la génération avant eux refuse d’accepter cet exil inévitable. Temps et Marées est une conversation entre jeunes et moins jeunes sur l’identité, le territoire et le bonheur.
Pour moi, un documentaire devrait nous permettre d’en apprendre sur son sujet. Surtout si on ne connait pas beaucoup le thème du film. C’est exactement ce que Temps et marées, de Sébastien Rist et Aude Leroux-Lévesque ne fait que trop peu…
Sur la côte est du Québec, de petites communautés anglophones parsèment les rives du Golfe du Saint-Laurent. Reculés et isolés, sans route qui les connectent au reste du Québec, ces villages de la Basse-Côte-Nord sont ce qu’ont pourrait appeler le « cul du monde ». Pendant des siècles, ils ont vécu de la pêche à la morue. Mais, en 1992, un moratoire national sur la pêche à la morue est venu tout bouleverser. Ces petits villages côtiers n’ont pas réussi, encore à ce jour, à renouveler leur économie…
C’est dans la petite communauté de Rivière Saint-Paul que Temps et marées suit plusieurs personnages à la croisée des chemins. Comme dans plusieurs petites villes (pas seulement les villages côtiers), il y a un clash qui s’opère entre les plus vieux et les plus jeunes. C’est ce que nous montre assez bien le documentaire.
Les « anciens » sont nostalgiques d’un temps passé où tout était plus fructueux, et les plus jeunes rêvent de s’en aller. Ou s’y soumettent dans le but d’avoir ne serait-ce qu’une chance d’avenir.
Ethan, Brittney, Whitney et Patrick vont terminer leur secondaire et quitter leur village pour aller poursuivre des études en ville, à des milliers de kilomètres de la maison. L’exil est leur seule option valable. La grande question, comme s’est souvent le cas, est de savoir s’ils reviendront un jour. Peut-être pour la retraite, dit un des adolescents.
Mais, en refusant d’accepter l’inévitable, la génération de leurs parents n’est-elle pas simplement en train de creuser sa propre tombe? Guy a transformé sont bateau de pêche à la morue en bateau pour la pêche au crabe. Mais pourra-t-il en vivre encore longtemps? Jusqu’à quel point Garland réussira-t-il à attirer les touristes au village et à faire vivre son petit musée?
La nostalgie des anciens nous amène seulement un constat qui est évident. Ces régions ne sont pas en train de se peupler et vivre de la pêche n’est plus vraiment une option. Et c’est peut-être ce qui ennuie dans ce film : on passe trop de temps à regarder ces gens s’attrister. La partie intéressante vient des jeunes et de la description qu’ils font de leur enfance et de leur vie à l’école.
Ethan est né dans la petite communauté de pêche de Rivière Saint-Paul. Il termine son secondaire 5 aux côtés de 8 collègues de classe seulement. Il a hâte de quitter la maison pour partir à la découverte du monde et envisage difficilement une vie pour lui à Rivière Saint-Paul. Brittney vient d’une famille de pêcheurs. Sa sœur aînée a déjà quitté la Côte-Nord pour poursuivre des études et elle ne prévoit pas y retourner. Avec ses parents à l’extérieur du village le plus clair de l’année, Brittney a été élevée en partie par sa grand-mère et a appris très tôt à être autonome. Elle n’est pas certaine de ce qu’elle veut faire après le secondaire, mais une chose est sûre : elle veut poursuivre des études post-secondaires. Ce qui veut dire quitter le coin. À l’écouter, ce n’est certainement pas le genre de vie qu’elle voudra offrir à sa descendance. Depuis presque toujours, ses parents ont été absents à ses anniversaires. Le travail d’abord…
Il y a une chose importante qui aurait peut-être dû être soulevée dans Temps et marées, et qui ne l’a pas été. Ces gens qui se disent des « oubliés » du Québec ont peut-être oublié quelque chose lorsqu’ils se plaignent que le gouvernement ne leur donne pas assez d’argent et que leur région si magnifique n’attire pas. Ces gens anglophones n’ont jamais, semble-t-il, fait d’effort pour apprendre la langue de Vigneault. Et comme les subventions sont remises à ceux qui le fond dans la langue officielle, c’est effectivement plus difficile pour eux. Ensuite, leurs magnifiques paysages sont aussi en danger à cause de leur mode de vie. Ils nous répètent à quel point ces paysages magistraux leurs sont chers, mais leurs activités contribuent à la destruction du paysage : chasse, motoneige, seadoo…
Au final, Temps et marées nous offre la vision triste d’une peuplade qui n’aura d’autre choix que de disparaitre… Comme c’est malheureusement le cas de bien d’autres.
Un petit film de dimanche après-midi pluvieux.
Note : 6/10
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