« The name is very clear. It’s always Sator who was in charge of everything. »
[Le nom est très clair. C’est Sator qui a toujours été en charge de tout.]
Menant une existence solitaire dans sa cabane au fond des bois, Adam (Gabe Nicholson) garde un œil sur son ordinateur pour y suivre les chevreuils qui passent dans l’angle des caméras installées ici et là dans la forêt. De temps en temps, il reçoit la visite de son frère, Pete (Michael Daniel). La grand-mère d’Adam occupe également une place importante dans sa vie. Depuis longtemps, « Nani » (June Petersom) sert de médium à un esprit qu’elle nomme Sator, entité qui, selon elle, l’entraîne et lui enseigne à être une personne. Graduellement, Adam découvrira que l’esprit en question n’a pas que de bonnes intentions. D’ailleurs, au commencement, Sator n’était présent que dans la seule psyché de Nani… Mais voici qu’il influe maintenant ailleurs, mettant en péril la vie d’Adam et de sa famille dysfonctionnelle.
C’est en s’inspirant de sa propre famille que Jordan Graham réussit à faire de Sator un film effrayant. Mais au fait, Sator, c’est qui?
« Yet, despite intensive psychiatric intervention, my grandmother insisted that the entity, Sator, was no figment of her imagination or the result of mental illness, but very real. Also very real in this film, despite its fictional premise, is my grandmother relating her unique and huntingly personal experiences of these encounters while her memory of them was still intact. Before her passing in May of 2019, dementia had removed her memories of me, her family, and of her participation in this film. Yet the one “person” whose memory she retained until the end was Sator. » [Et pourtant, malgré une intervention psychiatrique intensive, ma grand-mère a insisté sur le fait que l’entité, Sator, n’était pas le fruit de son imagination, ni le résultat d’une maladie mentale, mais qu’elle était bien réelle. Tout aussi réelle dans ce film, malgré sa prémisse fictive, est ma grand-mère qui raconte ses expériences personnelles uniques et hantées de ces rencontres alors que sa mémoire était encore intacte. Avant son décès en mai 2019, la démence lui avait enlevé la mémoire de sa famille, de moi, et de sa participation à ce film. Pourtant, la « personne » dont elle garda le souvenir jusqu’à la fin, fut Sator.]
Après avoir lu cette phrase du réalisateur, je trouve Sator encore plus effrayant. Pour être honnête, je me suis ennuyé en regardant ce film. Par contre, par moments, ça fout vraiment les jetons. La folie et la démence sont deux choses qui sont bien montrées dans ce long métrage. Oui, malgré sa thématique irréelle (en tout cas jusqu’à preuve du contraire), on y croit. Dommage que ce périple de chasse soit aussi ennuyant qu’un… périple de chasse.
Malgré cela, il y a de longues scènes dans lesquelles presque rien ne se passe, mais où l’atmosphère lourde et inquiétante fait vraiment peur. Je ne sais pas trop pourquoi, mais on dirait que ces histoires d’esprits maléfiques réussissent à toucher une corde sensible. Et je ne crois pas que ce soit seulement mon cas.
Les scènes de nuits, dans le chalet éclairé seulement par un fanal ou une lampe de poche sont marquantes. Le jeu de Gabe Nicholson est juste. L’éclairage est parfaitement bas, mais assez clair pour qu’on ne voit que le minimum. Puis, arrivent ces hommes-bêtes étranges. Cette fois-ci, ce sont les costumes qui sont au top. Et de temps en temps, il y a ces cris, perçants, mais discrets à la fois. On dirait preste un grincement.
Oui, l’ambiance permet de réellement apprécier ce film de 85 minutes qui contient des longueurs…
Pour le réalisateur, Sator est une œuvre profondément personnelle. Une histoire d’horreur minimaliste basée sur le récit de sa propre famille, où la menace grandissante d’une puissance surnaturelle sert à aborder le thème de l’isolement, tant physique que psychologique. Le générique du début, comme celui de la fin, nous signale que Graham a pratiquement tout fait lui-même sur ce projet : scénarisation, réalisation, photographie, production, montage, et ainsi de suite. Alternant entre les scènes en couleurs et le cadre étroit des flash-back en noir et blanc, avec de longs et mystérieux plans statiques, il réussit à prouver qu’on peut faire un bon film seul. Je suis convaincu qu’avec un petit peu d’aide, ce film aurait été extraordinaire.
Avec un sentiment de terreur omniprésent, Adam – tout comme le spectateur – cherche des réponses à ce qui a provoqué la disparition progressive de sa famille. Et si le spectateur se laisse embarquer, il réalisera vite que le minimalisme peut être franchement plus terrifiant que les gros effets spéciaux.
Note : 7/10
Sator est présenté au festival Fantasia le 21 juillet.
Visionnez la bande-annonce :
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