« You dont’get rich writing science fiction. If you want to get rich, you start a religion. »
[On ne devient pas riche en écrivant de la science-fiction. Si tu veux devenir riche, fonde une religion.]
Le Church of the SubGenius (l’Église du Sous-Génie) a été qualifiée de « théologie la plus agressivement absurde que le monde ait jamais connue! ». Mais qu’est-ce que l’Église? Et qui est J. R. « Bob » Dobbs? Et pourquoi son nom est-il toujours entre guillemets? La réalisatrice Sandy K. Boone explore le mouvement clandestin qui a incité le lunatique, l’artiste, le ringard, même le dérangé, à examiner la dystopie qui mijote en lui et à ne rien faire à ce sujet… sauf peut-être à se moquer de tout ça.
Avec J. R. Bob Dobbs and the Church of the SubGenius, Boone nous fait découvrir un univers incroyablement génial et une « religion » qui aurait pu convaincre des millions de personnes si elle avait été plus connue. Mais peut-être que sa force réside effectivement dans le fait qu’elle soit petite…
Vous le devinerez – je l’espère – cette église n’en est pas réellement une. C’est plutôt un mouvement visant à donner une parole et un lieu de rassemblement à tous ces marginaux qui ne trouvaient pas leur place dans la société de la fin des années 70 et du début des années 80. À ce moment où les sectes – dont la scientologie – pullulent et que les théories du complot se reproduisent, deux nerds du Texas, amateurs de bd, fondent une nouvelle religion dont la doctrine centrale est l’idée de « slacker » (Must have slack). Donc, à l’inverse de la majorité des religions du monde occidental qui demandent aux dévots de respecter une tonne de règles, la Church of the SubGenius, elle, vous ordonne de prendre ça relaxe et de ne pas vous en faire. Les ennemis de cette religion? Les pinks! Autrement dit le citoyen moyen qui vit à fond la société de consommation et le capitalisme.
Ce sont le révérend Ivan Stang et le docteur Philo Drummond, un douteux duo venu du Texas, qui ont discrètement introduit dans le circuit d’art postal américain une invitation cryptique à leur envoyer un dollar pour garantir son Salut. Ceux qui ont été assez stupides, braves ou visionnaires pour le faire ont reçu une brochure intitulée « The World Ends Tomorrow And You May Die! », un fou mélange de clip-art kitsch, de néologismes théologiques et de références à des extrémistes marginaux. C’est ainsi qu’un petit, mais puissant, mouvement de la contre-culture, une communauté pour les gens marginalisés et un engouement contagieux pour tout ce qui est scandaleux, perturbateur et iconoclaste sont nés. Et c’est ainsi qu’est née cette Église.
Mais, lorsque ces deux hommes ont créé leur pamphlet, ils ne se doutaient pas que leur idée susciterait à ce point l’emballement. Les gens ne se contentaient pas d’envoyer 1$. Certains envoyaient des centaines de dollars. C’était le début du mouvement qui allait éventuellement mener à de vrais rassemblements. Mais, à mesure que le mouvement grossissait, Stang et Drummond se sont rendu compte du danger qui y était associé. Plus il y a d’adeptes, plus le risque que les gens ne comprennent pas le message est grand. Il ne faudrait pas oublier que la brochure initiale se termine sur cette phrase : « Fuck’em if they can’t take a joke! » [Qu’ils aillent se faire foutre s’ils ne peuvent pas prendre une blague!].
Mais, évidemment, comme nous le montre le documentaire, certains illuminés ne l’avaient pas compris et croyaient réellement que la fin du monde arriverait en 1996… Oups!
Malgré tout, ce mouvement existe encore aujourd’hui. Bien que de retour dans la marge, le révérend Ivan vit de sa « mission » grâce aux adhésions et aux dons .
On assiste même, au début du film, à une cérémonie de fin du monde organisée par l’Église. Après la révélation de 1996, lors de laquelle la fin du monde ne s’est évidemment pas produite, les membres un peu trop cinglés sont probablement disparus et ceux qui y participent le font en bonne connaissance de cause.
Je n’ai pas encore répondu à la question du résumé, à savoir qui est donc J. R. « Bob » Dobbs. Je meurs d’envie de vous le dire. Mais j’aimerais plutôt vous inviter à regarder le film.
Grâce aux nombreuses contributions de Stang, Drummond et plusieurs dévots de l’Église du Sous-Génie (dont Richard Linklater, Nick Offerman et Penn Jillette), J. R. Bob Dobbs and the Church of the SubGenius réussit à retracer l’hilarante et incroyable histoire de cette « Église » qui a su défier les mœurs et l’hypocrisie de l’époque et prédire la folie existentielle d’aujourd’hui.
Note : 8.5/10
J. R. Bob Dobbs and the Church of the SubGenius est présenté au festival Fantasia le 19 juillet 2019.
Visionnez la bande-annonce :
© 2023 Le petit septième