Le 24 avril prochain, L’homme qui voit, le mythique logo de l’Office national du film du Canada (ONF), sera retiré de la façade de l’édifice de l’organisme, au 3155, chemin de la Côte-de-Liesse, en prévision de sa réinstallation, l’automne prochain, dans l’espace de son futur siège social qui s’élèvera bientôt au Quartier des spectacles.
Créé en 1968 par le designer graphique Georges Beaupré (1937-1986), alors directeur artistique de l’ONF, L’homme qui voit représente, schématiquement, un homme qui joint ses deux mains au-dessus de sa tête, créant une arche et figurant du même coup la forme d’un œil. « Les bras levés et les mains jointes suggèrent la célébration. La tête est semblable à l’iris d’un œil. C’est l’homme qui voit. C’est l’homme visionnaire, l’homme animé et peut-être même l’homme mis à nu », écrivait le commissaire Hugo McPherson, le 9 juillet 1970, dans une note de service adressée à tout le personnel et officialisant l’utilisation du nouveau logo. Ainsi, L’homme qui voit, symbole de l’importance de la vision dans notre humanité et notre développement, est devenu l’emblème du cinéma au Canada.
Le logo, fondu en aluminium dans un format de 2,71 mètres par 2,59 mètres, a été installé sur la façade du siège social de l’ONF, un bâtiment construit entre 1953 et 1956 spécifiquement pour les besoins de l’agence. Fondée à Ottawa en 1939, sa maison-mère est transférée à Montréal à cette époque pour favoriser le développement du cinéma francophone. L’installation du nouveau logo inaugure donc l’établissement de l’ONF à Montréal.
Plus de soixante ans plus tard, l’édifice chemin de la Côte-de-Liesse ne répondant plus aux besoins actuels en matière de production cinématographique, l’ONF prend la décision de se relocaliser en plein cœur du Quartier des Spectacles, à l’Îlot Balmoral. Ce déménagement est cependant aussi pour l’organisme l’opportunité de s’engager encore davantage dans sa mission, comme l’explique Claude Joli-Cœur, commissaire du gouvernement à la cinématographie et président de l’ONF :
Le déménagement du siège social de l’ONF à l’automne 2019 marque un nouveau chapitre dans l’histoire de l’organisation. C’est une occasion formidable d’aller à la rencontre des auditoires, d’être là où le public se trouve, dans un endroit ouvert et accessible à tous, au cœur du secteur névralgique de création et de diffusion qu’est le Quartier des spectacles à Montréal. […] le nouveau bureau central, situé dans un édifice emblématique, sera une vitrine nationale et internationale sur le savoir-faire et le talent d’ici, un espace propice à l’innovation, un lieu de rassemblement et d’échanges entre les créateurs, le personnel de l’ONF et le public.
C’est la firme d’architectes Provencher-Roy, et plus spécifiquement Eugenio Carelli, qui conçoit le projet de la nouvelle construction, qu’on aspire voir devenir le nouveau symbole, au cœur de Montréal, du cinéma d’ici. En effet, l’ONF profite de la relocalisation pour remplacer le conservatisme et la sobriété du précédent complexe par une recherche formelle plus originale. L’architecture, par son style innovant, parle ainsi elle-même de la fonction du bâtiment et de la créativité qui est au cœur du mandat de l’organisme. Preuve, une fois de plus, qu’une image vaut mille mots…
Ce proverbe se vérifie encore davantage si l’on s’attarde à L’homme qui voit lui-même. À l’origine de couleur verte, le logo a été légèrement modifié à deux reprises, la dernière mouture datant de 2002. L’homme qui voit se libère alors de son cadre rigide pour symboliser l’ouverture à la relève. Mais ce n’est pas le nouveau logo qui sera intégré au siège social de l’Îlot Balmoral…
Le choix de reprendre l’objet original pensé par Georges Beaupré plutôt que d’apposer le plus récent logo à la nouvelle façade est en soi très révélateur. En effet, L’homme qui voit de Beaupré a une qualité patrimoniale particulière, et ce pour plus d’une raison : il traite à la fois de son propre rôle dans l’histoire du cinéma, du design graphique et de l’ONF et affirme, par sa seule image, l’importance de notre métropole comme plaque tournante du cinéma en Amérique du Nord. Ainsi, l’insertion du logo original à l’Îlot Balmoral marque l’inscription du nouveau siège social dans l’histoire du cinéma à Montréal et au Canada.
Classé au patrimoine fédéral depuis 1998, le bâtiment du chemin de la Côte-de-Liesse se verra donc très prochainement dépouillé de son symbole phare qui, par son déplacement vers l’Îlot Balmoral, concrétise l’image et la fonction du lieu. L’architecture du futur siège social de l’ONF annonce l’ouverture du cinéma canadien à la modernité; L’homme qui voit son attachement à son patrimoine et à son histoire.
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Malgré un rendez-vous à 13hres….rien ne pourra me faire manquer ce très émouvant moment!!!!