Jalouse – Complètement hystérique

« Tu peux pas comprendre toi, tout va bien. En plus ta fille elle est moche. »

Jalouse - afficheNathalie Pêcheux, professeure de lettres divorcée, passe quasiment du jour au lendemain de mère attentionnée à jalouse maladive. Si sa première cible est sa ravissante fille de 18 ans, Mathilde, danseuse classique, son champ d’action s’étend bientôt à ses amis, ses collègues, voire son voisinage… Entre comédie grinçante et suspense psychologique, la bascule inattendue d’une femme.

Vieillir dans une société qui passe son temps à nous dire qu’il faut avoir l’air jeune, ce n’est pas facile. Être heureux du bonheur des autres lorsqu’on ne l’est pas, ce n’est pas facile. Voilà ce que vit Nathalie dans Jalouse, des frères Foenkinos.

Le bonheur

La recherche du bonheur est une quête de tous les jours. Et lorsqu’on est malheureux, le bonheur des autres est difficile à accepter. C’est ce qui frappe Nathalie lorsqu’elle raconte à son médecin généraliste que le bonheur des autres lui « saute au visage ».

Jalouse - Le bonheur
Nathalie et son ex-mari

Du coup, elle fait preuve d’une inventivité redoutable lorsqu’il s’agit de rejeter les autres. Dire à sa meilleure amie que c’est facile pour elle d’être heureuse parce que sa fille est moche prouve cette créativité.

Mais pour « guérir » sa peine, Nathalie devra accepter que c’est elle qui a un problème et non pas les autres. Mais ce n’est pas évident lorsqu’on a l’impression que tout le monde nous attaque et nous menace. Ici, cette menace vient de sa fille, de son ex, de la copine de son ex, de sa meilleure amie, du mari de celle-ci, et même de l’homme qu’elle commence à peine à fréquenter.

La relation mère-fille

Jalouse - Relation mère-fille
Nathalie, Mathilde et son copain

Mais c’est dans la relation qu’entretien Nathalie avec Mathilde, sa fille, qui montre la profondeur de sa tristesse, de son désespoir, de sa maladie…

Voir éclore la beauté et la grâce, la promesse et l’avenir, au moment où votre vie semble décliner, c’est certainement difficile.  

On devine qu’elles ont été très proches. Mais Mathilde est arrivée à un âge où elle est plus heureuse en dehors de la relation. Elle préfère être avec son copain. Et Nathalie le vit comme une forme d’abandon. La jalousie qu’elle éprouve envers sa fille est probablement teintée de déception. Ajoutons à cela que Nathalie est déçue par sa fille qui préfère devenir une danseuse de ballet plutôt qu’une intellectuelle. La mère aurait aimé que comme l’une de ses élèves, sa fille fasse de brillantes études. Or, elle a, comme le lui balance la triste femme, « privilégiée le corps à l’intellect en choisissant la danse ». Alors plutôt que de la supporter dans son choix, elle lui en veut. D’autant plus qu’elle est heureuse.

La maladie

Jalouse - La maladie
Nathalie et sa jeune collègue

Nathalie est un personnage qui est traversé par de nombreux doutes. Ça devient une maladie. Au point qu’elle en veut à sa fille d’être belle et talentueuse.

Comme l’explique l’un des réalisateurs, « c’est finalement assez tabou d’envier les autres, de ne pas les supporter parce que leur vie vous paraît meilleure, plus épanouie. Et c’est d’autant plus interdit quand il s’agit de vos propres enfants. »

Évidemment, l’espèce d’hystérie de Nathalie n’a rien à voir avec sa fille. Elle a beaucoup de difficulté à s’accepter. Son divorce la laisse encore amère, son célibat à l’aube de la cinquantaine lui pèse et la réussite des autres lui fait mal. Le point culminant est l’arrivée d’une jeune enseignante pleine d’énergie et d’idées nouvelles (la superbe Anaïs Demoustier).

Là, c’est la dépression!

Mais encore…

Jalouse impressionne par la qualité de ses acteurs et actrices. Les acteurs français sont très bons. Mais ce sont les « étrangers » qui font, en quelque sorte, la différence.

Et ne croyez pas que je veux diminuer l’apport des comédiens français. Je veux juste souligner que d’y incorporer la sublime Dara Tombroff, une danseuse sans expérience d’actrice, et Anne Dorval, une Québécoise qui a peu joué en France, était risqué. On ne sait jamais si la sauce prendra.

Jalouse - Mais encore 1
Nathalie et Mathilde

Trouver la perle rare pour incarner Mathilde était sans aucun doute un grand défi. Les danseuses classiques d’un très bon niveau qui sont belles et qui peuvent en plus jouer la comédie, ça ne court pas les rues. Et pour la trouver, ils ont vu près de 300 filles. Dara était danseuse à l’Opéra de Bordeaux et a postulé sans trop y croire. Et le plus drôle dans tout ça, c’est qu’elle avait pris la décision d’arrêter la danse et cherchait inconsciemment une manière de se réinventer. Quoiqu’elle décide de faire, une autre carrière s’ouvre à elle. Ça rappelle l’histoire de Polina, danser sa vie.

Jalouse - Mais encore 2
Nathalie et Sophie, sa meilleure amie

Puis, il y a Anne Dorval… La meilleure amie de Nathalie. Elle est d’ailleurs réellement bien intégrée à l’histoire. Elle n’est pas un simple faire-valoir pour l’héroïne, comme c’est souvent le cas au cinéma. Ici, elle représente merveilleusement bien la vraie bonne amie. Doit-elle fuir? Doit-elle rester et tenter de l’aider? Le personnage de Sophie se pose toutes ces questions.

Avec Jalouse, les frères Foenkinos offrent un film amusant, mais intelligent. Un film qui fait réfléchir à certains tabous, surtout dans l’amitié et dans les relations mère-fille.

Note : 8/10

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