Le documentaire A Great Day in Paris, réalisé, scénarisé et produit par Michka Saäl, à partir d’une idée du saxophoniste Ricky Ford, a été tourné entre 2008 et 2015 à Paris, dans la rue la plupart du temps, pour montrer les retrouvailles de musiciens de jazz noirs qui sont venus des États-Unis dans les années 50 et 60 pour s’établir en France.
Ce film se veut un grand sourire à la vie, mais parle de racisme cruel et de misère économique.
Bobby Few, un pianiste génial, Sangona Everett, un batteur extraordinaire, et d’autres grands jazzmen comme Ricky Ford, John Betch et Kirk Lightsey jouent pour le film et nous racontent leur parcours peu commun.
Le tout se passe en alternant entre une ambiance de confidence, un rassemblement-retrouvailles dans la rue en face du bar Au soleil de la butte Montmartre et des prestations, parfois dans une galerie d’art et parfois dans une salle de spectacles.
Les musiciens nous disent comment et surtout pourquoi ils ont décidé d’aller à Paris. L’un d’eux, engagé dans l’armée américaine, raconte qu’un soir, avec sa fiancée, il était vêtu de son habit de l’armée à Fort Knox et aussitôt qu’il est entré dans un restaurant pour un repas il s’est fait dire « On ne sert pas les Noirs ici »…
Des anecdotes comme celle-là, ils en ont tous. Ils ont choisi Paris parce qu’ils sentaient qu’en France, la musique était plus importante que la couleur de la peau. L’un dit qu’il a choisi Paris parce que c’est proche de l’Afrique…
C’est un documentaire sur les musiciens, mais, ce que l’on retient davantage, c’est la chaleur humaine, l’optimisme de ces gens de qui l’on n’entend pourtant aucune plainte. Raconte aussi le fait d’être Noir aux États-Unis dans les années 60. « Même à Détroit, dans un quartier noir, je ne sortais jamais dans la rue sans être très bien vêtu… », comme pour contrer le sentiment d’être un sous-humain.
Le jazz est une musique particulière. Basée d’origine sur des instruments qui dialoguent, qui jasent, d’où le nom même.
Un seul instrument peut raconter une vie. Le jazz peut nous sembler une musique abstraite si l’on fait un parallèle avec la peinture, par exemple. « Lire la musique est un tabou pour un musicien de jazz », dit Ricky Ford.
Le film est un peu particulier, étant tourné à Paris, raconté par des Américains devenus Français, mais que l’on double parfois en anglais avec des sous-titres français…
Ce document se veut d’une grande émotion, des retrouvailles émotives avec un fond de musique aussi émotive.
Ces musiciens ont parfois fait une grande carrière dans l’ombre, accompagnant quelqu’un qui était sous les projecteurs.
Le jazz est une musique marginale et, même si l’on sondait la population en général, Aznavour, Lama, Renaud seraient connus de tous, mais bien peu (incluant moi) connaissent Bobby Few, un des plus grands pianistes de jazz vivants.
Les rencontres intimes avec la caméra nous racontent de beaux moments. « Les autres enfants jouaient au baseball pendant que je pratiquais mon piano », nous dit Bobby Few.
« On a quitté tout mais on a la musique… »
A Great Day in Paris se compare au jazz, on aime ou on n’aime pas.
J’ai aimé.
Note : 8/10
Le film sera projeté au RVQC le 23 février 2018.
Voici la photo à la base de ce film :
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Merci ! Très bon article. Linda Soucy, attachée de presse