« Maman, je suis enceinte! »
« Déjà!?! »
Aurore (Agnès Jaoui) est séparée, elle vient de perdre son emploi et apprend qu’elle va être grand-mère. La société la pousse doucement vers la sortie, mais quand Aurore retrouve par hasard son amour de jeunesse, elle entre en résistance, refusant la casse à laquelle elle semble être destinée. Et si c’était maintenant qu’une nouvelle vie pouvait commencer?
Aurore, de Blandine Lenoir, est une comédie dramatique qui traite de la sensation de mal-être qui s’installe en nous lorsqu’on vieillit. Et surtout que vieillir se vit souvent différemment pour les hommes et pour les femmes.
Accoutumée des comédies traitant de la féminité sous toutes ses formes, la réalisatrice traite ici d’un sujet peu représenté au cinéma : celui de la femme post-quadragénaire qui résiste au vieillissement. Blandine Lenoir s’est alors basée sur son expérience personnelle pour rendre hommage aux femmes qui franchissent un cap dans leur vie personnelle comme dans l’imaginaire collectif.
C’est un fait que les femmes de plus de 50 ans sont peu représentées au cinéma. D’ailleurs, combien d’actrices de grand talent attendent sans travailler lorsqu’elles ont passé la quarantaine? La réalisatrice pose en ce sens une question intéressante : « Comment avoir envie d’atteindre un âge qui n’est pas représenté? »
Je dois faire une confession : je suis un homme! Ok, ce n’est pas une très grande confession. Voici pourquoi je prends le temps de le mentionner. Dans Aurore, Lenoir nous montre la complexité des relations mère/filles. Évidemment, je n’ai pas l’expérience de cette relation, mais je prends tout de même le risque d’en parler.
Ici, Aurore entretien une relation de proximité avec sa cadette. Mais la relation est un peu plus difficile, par moments, avec la plus vieille. Mais comme la mère vit mal le fait de vieillir, lorsqu’elle apprend que sa fille (qui n’a pas encore 30 ans) est enceinte, elle frappe un mur. Elle sera grand-mère… Voilà une bonne façon de créer de la tension. Ça et le fait qu’elle répond à sa fille qui lui apprend qu’elle est enceinte : « Déjà? » Sans oublier la suite où la fille dit à sa mère : « Tu m’as eue jeune toi aussi » pour se voir répondre : « T’es pas obligée de faire les mêmes conneries… »
Quand on regarde Aurore, on pourrait croire que le féminisme en prend pour son rhume. L’ainée n’a pas fait d’études et elle travaille comme vendeuse dans une boutique. La plus jeune, elle, est « aux petits soins » pour son amoureux. Lorsqu’il rentre, elle lui fait son repas alors que lui se repose. Vous voyez le genre…
Plus ça change et plus c’est pareil, diraient certains.
D’ailleurs, Aurore et sa meilleure amie n’en reviennent pas de voir cette jeune femme agir ainsi. Après toutes ces luttes féministes. Mais Lucie (la cadette) doit faire ses propres découvertes. N’est-ce pas là la seule façon d’avancer efficacement dans la vie?
Je veux aussi mentionner une scène très intéressante et une superbe touche de la part de la réalisatrice. À un moment, on assiste à une entrevue de l’ethnologue et féministe Françoise Héritier qui explique qu’il n’y a pas si longtemps, la vie utile de la femme s’arrêtait à la ménopause. Elle devenait, alors, « inexistante ».
Bien que léger, Aurore n’est pas dénué d’intérêt. Prendre de l’âge est quelque chose qui s’apprend et qui s’accepte.
Les enfants qui quittent le nid familial est souvent l’un des exemples que l’on voit au cinéma. Mais cela est souvent montré comme un soulagement pour les parents. Et pourtant, de façon générale, les parents semblent le vivre assez difficilement. Bien qu’un parent est fier de voir son enfant voler de ses propres ailes, c’est un moment émouvant dans la vie. Et un moment qui vient en vieillissant.
Le film aborde aussi l’humiliation qu’une personne peut ressentir au travail lorsqu’elle doit se mesurer à des collègues et à des patrons plus jeunes. Et Aurore ne l’a pas facile à ce niveau. Son nouveau patron va jusqu’à lui dire qu’il l’appellera plutôt Samantha, car Aurore n’est pas très gagnant.
Et, évidemment, retomber en amour après 50 ans…
À l’approche des fêtes de fin d’année, un film comme Aurore fait du bien. Il faut parfois se laisser tenter.
Joyeuses fêtes!
Note : 7.5/10
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