Prisonniers de leur quotidien technologique, Julie (Ève Duranceau) et Victor (William Pelletier) sont déçus par leurs semblables. Ils tombent par hasard sur un rassemblement de gens mystérieux qui les accueillent et leur donnent un rôle prêt-à-porter. Le groupe s’enfonce dans la forêt vers une destination inconnue jusqu’à ce qu’une force l’attaque. Unis face au danger, Julie et Victor devront départager le vrai du faux. Ou se laisser aller au plaisir de l’artifice…
Le court métrage de 25 minutes de Yan Giroux, Lost Paradise Lost, a été présenté en première mondiale au Festival international du film de Vancouver (VIFF) le 1er octobre dernier, où il est en compétition pour le Meilleur court métrage canadien dans la section « Altered States ». Le 6 octobre, le FNC le projette en première québécoise et il concourt dans la section Focus Québec/Canada.
Le mythe du paradis perdu en est un qui a fait couler beaucoup d’encre. Plusieurs artistes ont recréé leur paradis perdu, l’ont adapté de mille et une façons. Il n’en reste pas moins que Yan Giroux a réussi à trouver une idée originale autour de ce thème. Originale et quelque peu déroutante. Mais que serait la vie sans une touche de confusion.
Le paradis perdu de Giroux, c’est un espoir partagé : celui de trouver l’âme sœur. C’est du même coup un désespoir partagé : une soif de nouveauté qui passe ici par la simplicité. Il y a beaucoup de douceur dans le jeu des acteurs. Les personnages avancent à tâtons, se suivent, presque sans réfléchir, par mimétisme, par nécessité. Ils entreprennent une nouvelle aventure, sans enthousiasme apparent.
Les deux personnages principaux, Julie et Victor, sont entraînés dans cette aventure qui les dépasse. Et ils semblent être les seuls à être dépassés. Leur visite dans la forêt prend des airs de rite initiatique, de retour à la terre, de quête de l’essentiel. Et ils ne comprennent pas tout ce qui s’y passe. Encore faut-il se laisser prendre au jeu, accepter de se laisser aller, de perdre le contrôle. Ils le perdront d’ailleurs tout à fait quand eux et le groupe qu’ils accompagnent se feront attaquer…
L’une des très belles scènes du film est un plan large de personnes nues qui se lèvent dans une clairière au clair de lune. Je ne peux ici qu’être en accord avec le réalisateur : « C’est compliqué éclairer la nuit, mais quelle beauté de faire apparaître des corps dans le noir. » Et pour le côté cocasse : « À 4 heures du matin, nus dans une clairière détrempée, ils [les figurants et tous les acteurs] avaient encore le cœur à rire de moi qui leur demandait une dernière, dernière prise. » (notes de tournage 05) Des acteurs talentueux, qui réussissent à faire passer l’émotion, avec une grande économie de mots.
Le noir et blanc sert en ce sens très bien le film. Les personnages devront sortir de cette nuit de déroute, mais le souhaitent-ils vraiment? Qu’émergera-t-il à la fin? Trouveront-ils le paradis perdu espéré?
Lost Paradise Lost s’apparente à un jeu grandeur nature dans lequel les participants n’ont pas de script ni de rôle préétabli, où il deviendra de plus en plus difficile de démêler le vrai du faux…
Note : 8/10
* Le film sera présenté au FNC les 6 et 14 octobre 2017.
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