Tianjin est reconnu pour ses écoles d’arts martiaux. Donc, lorsque Maître Chen arrive en ville avec l’intention d’ouvrir sa propre école, la résistance qu’il suscite de la part des autres écoles d’arts martiaux de la ville n’est ni surprenante ni faible. Mais Chen est la dernière personne vivante qui maîtrise le formidable style de Wing Chun, et pour honorer son professeur, il est prêt à passer le flambeau à son tour. Les règles du monde lugubre des combattants de Tianjin rendent la vie difficile à Chen. Il doit accepter la supercherie, compromettre son éthique et former un champion pour le représenter (tout en négociant un mariage tendu et à demi frauduleux avec Zhao, une marginale ravissante qui n’a rien à lui envier dans la bataille des sexes). Chen prend comme apprenti Geng, jeune punk de la rue, effronté, mais non moins brillant. Au fil du temps, Chen se rapproche de ses objectifs, tandis que les règles ne cessent d’évoluer. Chen vaincra, mais à quel prix?
Après The Sword Identity et Judge Archer, The Final Master est le troisième volet d’une trilogie par le scénariste, chorégraphe récompensé de nombreux prix et réalisateur Xu Haofeng. C’est un spécialiste érudit d’arts martiaux chinois, sur les plans technique, historique, philosophique et politique.
Pour clore sa trilogie thématique, Xu Haofeng choisit de rendre hommage à l’art martial d’Ip Man et de Bruce Lee, l’art martial du sud de la Chine, le Wing Chun. En choisissant cet art plutôt qu’un autre, le choix est fait de mettre en opposition deux cultures, deux traditions, et des valeurs différentes.
Dans The Final Master, le maître de cet art, Maitre Chen est originaire de Canton, le sud de la Chine. Son art, le Wing Chun est sur le point de disparaître, car il est le dernier connaisseur de ses secrets. Maître Chen a donc besoin d’ouvrir une école à Tianjin, car il n’est plus possible qu’il réside à Canton.
Sauf qu’une école d’art martial, comme tout amateur de film de kung fu le sait bien, ça ne s’ouvre pas comme ça. Les autres maîtres des écoles de la ville doivent donner leur autorisation suite à des combats. En fonction de qui gagne ou perd, l’école pourra ouvrir ou non. S’en vient donc tout un stratagème avec un des maîtres de la ville pour mettre au point une victoire sans conteste pour Maître Chen. Il apprendra les secrets de son art à son apprenti, un punk de la rue, Geng.
Côté pratique, on est spectateur de combats spectaculaires, exceptionnellement bien calculés, comme chaque fois avec Xu Haofeng. Enfin, on notera le clin d’œil-hommage qui est fait à Bruce Lee, excellent danseur de chacha. En effet, on voit souvent les maîtres se réunir dans un bar à danseuses biélorusses, pour finalement comparer l’art de maîtriser ses pas de danse à celui de maîtriser la parfaite mesure de ses gestes en kung fu.
Les maîtres de kung fu, on le sait, sont un équilibre parfait entre mesure du combat et mesure de soi. Devant des traditions codifiées, ce sont de réelles valeurs ancestrales qui nous sont transmises. La perte de l’honneur suite à une défaite ou une insurrection, le sens des responsabilités face à la menace qui pèse sur son apprenti, épargner l’honneur de sa femme en divorçant si nécessaire, etc. Tant de maîtrise que Maître Chen décidera de suivre pour être encore un homme.
Au-delà du sérieux, nous n’oublierons pas de noter les nombreuses situations cocasses qui apparaissent pendant le film. Maître Chen capable de repousser ses ennemis de la main, en tenant un chiot dans l’autre. Un de ses adversaires le poursuivant, qui rebrousse chemin en croisant son regard, et en reposant le banc qu’il venait de faire voler précédemment, etc.
Cependant, la barrière de la langue est encore une fois problématique face à une œuvre présentée dans un dialecte que nous ne maîtrisons peut-être pas. En effet, certaines traductions fantaisistes nous ont donné quelques éclats de rire, initialement non voulus par l’auteur. Pensons notamment à la scène où l’apprenti Geng est surpris de la blessure à la poitrine de son maître, et où Chen lui répond « qu’il s’est blessé en se rasant ». En mandarin, la réplique est « je me suis blessé en « bricolant » sur la maison ». Malgré la réussite humoristique de cette traduction, elle retire tout son sérieux à la scène.
Note : 8 /10
* Le film était projeté au festival Fantasia.
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