Quand l’enfant était petit, il aimait marcher pieds nus, grimper aux arbres, et jouer au football. Quand l’enfant était petit, il faisait des travaux d’adulte. Il allait chercher de l’eau, des bouts de bois, et de la nourriture. Quand l’enfant était un enfant, il imitait les adultes sans savoir qu’ils lui avaient laissé un monde injuste, un monde qui a échoué.
Dans la communauté rurale de La Miele située dans le nord-est d’Haïti, les conditions environnementales extrêmes poussent la population à émigrer vers la République dominicaine. Devilma vient d’avoir un cinquième fils de sa troisième épouse, les enfants travaillent aux champs et jouent peu. La communauté a un chant populaire pour chaque évènement de la vie quotidienne, de même que des références bibliques ou superstitieuses pour décrire leur situation.
Chantravay (Haïti, République dominicaine) d’Issonet Charlot est un court-métrage documentaire sur une petite communauté haïtienne très croyante. Toutes leurs actions sont guidées par les enseignements bibliques. Et ils préfèrent sans remettre à la magie plutôt qu’à la médecine.
C’est la pauvreté d’Haïti qui ressort de plusieurs plans, surtout lorsque l’on compare les maisons haïtiennes à celles de la République dominicaine. On suit un homme qui part de chez lui et traverse la frontière par les terres pour travailler avant de rentrer à la fin de la journée. Il cumule les petits boulots, va là où l’on a besoin de lui, soulève de lourdes charges malgré son corps fatigué.
Les enfants s’occupent de plusieurs tâches. Leur mode de vie n’a rien à voir avec ceux nord-américains. Mais on montre aussi leur plaisir, quelques jeux d’enfant, dont le football. Quant aux adultes, on les montre uni par les chants qui sont très présents et importants pour cette communauté. On chante la gloire de Dieu et de son fils.
J’ai été particulièrement touchée par l’attitude positive des gens qui assistent à l’enterrement de l’un des leurs. Plutôt que de pleurer le mort, on le célèbre. On laisse les enfants jouer toute la journée, le plaisir est à l’honneur. Et les porteurs du cercueil avancent en esquissant quelques pas de danse.
Quand Devilma sera malade, il ira consulter un médecin. Malgré un diagnostic sérieux, plutôt que de se tourner vers la médecine, on recherche des alternatives. Est-ce qu’on refuse l’hôpital pour une question monétaire ou croit-on vraiment que les croyances religieuses ont un plus grand pouvoir? Je ne saurais le dire vraiment.
Quoi qu’il en soit, ce n’est pas vers Dieu que l’on se tourne alors, même si on le chante constamment, mais vers la religion vaudou. C’est par la pratique de rites ancestraux que l’on tentera de chasser le mal, ou peut-être simplement de minimiser ses effets.
Les membres de cette communauté haïtienne se rattachent à la religion, y trouvent force et courage. J’ai souvent de grandes réserves face à la religion que je trouve souvent plus nuisible qu’autre chose (avec toutes les guerres de religion). Il n’en reste pas moins qu’ici c’est le ciment de cette communauté, ce qui les encourage à traverser les épreuves et les misères.
Chantravay est un hymne à la vie, malgré la mort, malgré la souffrance, malgré la pauvreté.
Note : 7/10
* À voir au Festival Vues d’Afrique.
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