À la suite du décès de sa mère, Maria (Jembie Almazan) voyage des Philippines à Montréal pour vivre chez sa grand-mère. Se sentant isolée et perdue, à la fois chez elle et à l’école, elle finit par se lier d’amitié avec les membres d’un gang de paumés philippins. Alex (Jonathan Diaz Angulo), un Colombien de 19 ans est renvoyé à Buenaventura par les autorités des États-Unis. Il emporte avec lui le secret de la mort de son frère. Le retour du jeune homme suscite l’intérêt d’un gang local. Afin de survivre et de protéger son plus jeune frère, Alex prend la décision de se joindre à eux. David (Bernardo Garnica Cruz), 16 ans, d’origine Mazahua, quitte son village autochtone pour la ville de Mexico après la mort de son père. Il décroche un boulot sur un chantier de construction et commence à fréquenter un groupe de punks qui l’aidera à trouver son identité véritable.
X Quinientos, le second long métrage de Juan Andrés Aragon, suit trois adolescents qui cherchent qui ils sont à la suite d’un deuil (la mort d’une mère, d’un père ou d’un frère) et d’une migration. Issus de milieux sociaux et culturels différents, leurs questionnements et leur parcours se ressemblent. Les gens qu’ils fréquenteront influenceront, ici négativement, leurs choix.
« Dans X Quinientos, les représentations du paumé, du gangster et du punk ont toutes des connotations différentes selon le pays et selon qu’on les observe du quartier de Bajamar de Buenaventura, du marché central de Mexico ou du quartier Côtes-des-Neiges de Montréal », expliquait le réalisateur.
Montréal, Mexico et Buenaventura. Canada, Mexique, Colombie. Maria, David, Alex. Ces trois lieux montrent une même réalité, un même malaise. L’identité se crée principalement à l’adolescence, à partir de nos choix de vie. C’est là une période charnière et aucun des trois n’y échappe.
Ces trois réalités sont montrées simultanément et non pas en trois tableaux successifs. Les allers et retours sont fréquents et rythment le film. X Quinientos est lent, montre les hésitations et les élans des personnages, rend compte de leurs états d’âme. Plusieurs plans sont sombres, à l’image de leurs pensées, de leurs perceptions de l’avenir à partir de ce qu’ils vivent dans le présent. Comment faire sa place dans un monde qui, a priori, ne leur ressemble pas?
Le réalisateur canado-colombien a connu le déracinement, à un âge assez semblable aux différents personnages : « Moi-même immigrant à Mexico et à Montréal, je me suis construit une identité à partir de ce que j’ai appris de cette expérience et j’ai choisi Buenaventura en Colombie comme cadre de ma troisième histoire […]. Buenaventura est le plus grand port de Colombie. C’est aussi un des endroits les plus dangereux en Amérique du Sud, un lieu qui abrite un groupe d’Afro-colombiens fascinant qui y vit en marge de la société depuis l’époque de l’esclavage et qui exerce malgré tout une nette influence sur la culture et la musique de Colombie. »
Les trois jeunes jouent très bien, avec naturel. J’ai été surprise d’apprendre qu’il était tous non-professionnels. Et c’était là un souhait du réalisateur. Il est ainsi allé au plus près de la réalité vécue par ces jeunes déracinés : « Le casting a commencé au tout début de ma recherche et j’ai mis sur pied des groupes préliminaires d’acteurs non-professionnels issus du même milieu que mes personnages. J’ai fait des répétitions et des improvisations avec eux en puisant l’inspiration à partir des scènes qu’ils jouaient. J’ai extrait de ces exercices de nombreux détails qui m’ont beaucoup servi lors de l’écriture des dialogues. Chaque acteur, chaque actrice y a ainsi contribué avec son propre vécu et son expérience personnelle. »
Originaire des Philippines, Jembie Almazan est arrivée en 2008 au Canada. Elle vit maintenant à Montréal, où elle poursuit des études en Sciences de la santé. Bernardo Garnica Cruz vient de San José del Rincón, une communauté rurale de l’État de Mexico. À l’adolescence, à l’instar de son personnage, il a déménagé dans la capitale, où il a travaillé dans le domaine de la construction. Il a été choisi parmi 40 jeunes punks locaux pour interpréter le personnage principal de l’épisode mexicain. Quant à Jonathan Diaz Angulo, il est né à Buenaventura où il vit toujours. Il étudie actuellement au secondaire et rêve de devenir ingénieur en électronique.
De ces trois expériences des lieux présentés, le bagage des acteurs, dont le parcours ressemble parfois étrangement à ceux de leur personnage, peut-être sans la notion de deuil, apporte une profondeur, une vérité au long métrage d’Aragon.
C’est un film rempli d’embûches, mais qui laisse entrevoir un peu d’espoir.
X Quinientos ou la recherche de soi.
Note : 8,5/10
© 2023 Le petit septième