Lavaltrie, 1888. Joe Lebel (Francis Ducharme) et Liza Gilbert (Caroline Dhavernas) sont amoureux. Mais Liza a une dette; elle n’en sait rien, mais vingt-deux ans plus tôt, son père a conclu un pacte occulte… qu’il a rompu. Et aujourd’hui, le sinistre Jack Murphy (François Papineau) débarque en ville, comptant bien obtenir réparation… Bien vite, un incendie suspect force Joe à retourner sur les chantiers forestiers; le notaire Boisjoli (Vincent-Guillaume Otis) rôde autour de la belle Liza… et l’hiver arrive. Le chantier semble maudit et, sans nouvelles de son amoureux, le doute s’installe chez Liza comme une gangrène. Joe parviendra-t-il à revenir des chantiers et déjouer la machination de ces forces obscures? Son dernier espoir, son ultime recours réside peut-être en… une dernière Chasse-Galerie.
Chasse-Galerie : la légende de Jean-Philippe Duval renoue avec l’une des légendes de la tradition orale les plus célèbres au Canada français. La version écrite la plus connue de La chasse-galerie est certainement celle d’Honoré Beaugrand, publiée en 1900. Dans cette dernière, l’histoire d’amour entre Liza et Joe n’est que brièvement abordée. L’histoire de la traversée infernale en canot et ses conséquences sont davantage développées.
Avant de me rendre en salle, j’ai relu la courte nouvelle de Beaugrand afin de mettre dans l’ambiance. J’ai longuement hésité avant d’aller voir le film. Je craignais que ce soit trop romancé et je dois avouer que je ne m’étais pas vraiment trompée à ce propos. On trouve malgré tout quelques éléments intéressants.
On présente bien, il me semble, un pan de la vie canadienne-française par le travail dans les chantiers isolés. Au 19e siècle, il n’était pas rare que les agriculteurs quittent leurs terres à l’automne pour aller bûcher dans les chantiers afin de subvenir aux besoins de leur famille. Les conditions de vie de ces hommes étaient alors particulièrement précaires et difficiles, et les accidents étaient fréquents. Faute d’assistance médicale, certains ne revenaient pas au printemps.
Plusieurs légendes circulaient alors et celle de la chasse-galerie est certainement l’une des plus connues. Des hommes faisant un pacte avec le diable pouvaient rentrer voir l’élue de leur cœur le temps d’une nuit.
Dans le film, le diable prend forme humaine : Jack Murphy vit parmi les hommes, un peu trop comme un homme normal avec des airs d’aristocrate qui détone légèrement. Qu’il agisse comme tout un chacun en public apparaît tout à fait logique, mais qu’il le fasse aussi dans l’intimité à de quoi laisser perplexe. La scène du rasage m’a semblé superflue, voire dérangeante. Et pourquoi traverse-t-il à pied le lac gelé pour aller s’agenouiller auprès de Théodore, lui qui peut aisément parcourir des centaines de kilomètres sans devoir voyager par canot volant?
Le réalisateur expliquait les motivations qui l’ont poussé à faire revivre cette légende : « Pour moi, raconter la chasse-galerie c’était d’abord faire un film sur notre histoire, dans un traitement brut, près de ces hommes, un film authentique et sans racolage un suspense historique plus proche du western que du film fantastique. » Un « western » qui prend place sur des terres quasi inatteignables, dans des conditions glaciales. C’est une présentation, disons, inusitée, mais intéressante.
Chasse-Galerie : la légende rend hommage à cette légende qui est l’un des fondements de la culture canadienne-française.
Êtes-vous prêts à prendre part à une envolée infernale, dont on ne sait si l’on reviendra vivant?
Note : 5,5/10
© 2023 Le petit septième
Article très intéressant , merci.