Nymph()maniac de Lars von Trier est la folle et poétique histoire du parcours érotique d’une femme, de sa naissance jusqu’à l’âge de 50 ans, racontée par le personnage principal, Joe, qui s’est autodiagnostiquée nymphomane. Le film (vol. I et II) est divisé en huit chapitres. Chaque chapitre s’inspire d’un élément présent dans la chambre (de l’hameçon de pêche à une tache de thé sur le mur) où Joe se confie à Seligman.
Divisé en deux volumes, voici la critique de la seconde partie du film. Le personnage de Joe adolescente (Stacy Martin) est remplacée dans les premières minutes du film par celui de Joe (Charlotte Gainsbourg). Le changement est quelque peu dérangeant puisqu’on ne fait un saut dans le temps que de trois années. Mais puisque Gainsbourg est la narratrice du film depuis le commencement du volume I, on fait rapidement abstraction du changement. Joe vient alors d’avoir un enfant. Jérôme, son amoureux et le père de son garçon, incapable de satisfaire à lui seul l’appétit sexuel de sa partenaire, lui autorise à contrecœur à coucher avec d’autres hommes. La vie de Joe prendra alors un tout autre tournant. En constante recherche de stimuli, elle va à la rencontre d’un homme violent, ce qui donne lieu à des scènes de masochisme. Elle devient si obsédée par ces rencontres secrètes, qu’elle en délaissera son fils. Le rapport à la mauvaise mère est ainsi soulevé. À cet effet, une scène d’Antichrist (2009) est reprise, celle où le bébé marche jusqu’à la rambarde du balcon, sur le même air classique, avec le même décor enneigé…
Le deuxième film est plus dur que le précédent par les pratiques sexuelles, mais également par les propos. Joe ne fait pas dans la dentelle. Elle utilise le terme Nègre bien que Seligman (Stellan Skarsgård), l’homme qui la recueille et à qui elle confie l’histoire de sa vie, lui signale la connotation négative. Elle lui répondra que dans son milieu, « on appelle un chat un chat et un Nègre un Nègre ». Il faut dire que Seligman est l’antithèse de Joe, n’ayant jamais eu de rapports sexuels et ne les ayant d’ailleurs jamais désirés. Joe discute aussi de comportements pédophiles comme d’une autre déviance qui s’apparenterait à la nymphomanie. Ce type de discours choquant semble pourtant si naturel pour cette femme.
Ses différentes expériences sexuelles permettront à Joe de lancer son entreprise de recouvrements. Elle trouve ainsi, pour chaque personne à collecter, le traitement-choc le plus adapté. Avançant en âge, son associé (Willem Dafoe) lui parle de l’importance d’assurer sa succession. Elle prend alors sous son aile la jeune P. (Mia Goth), devenant sa mère de substitution. Une jeune âme à corrompre…
Les dernières minutes du film nous amènent à réfléchir sur les perceptions homme/femme. En tant que nymphomane, Joe est mal perçue socialement. Mais si c’était un homme qui recherchait tous ces plaisirs, porterait-on sur lui les mêmes jugements? Je ne le crois pas et c’est tout de même troublant.
Nymph()maniac est à l’image d’un petit rayon de soleil sur un mur de brique. Joe sera-t-elle en mesure, après sa confession, de trouver un semblant de paix?
Note : 8,5/10
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