« L’éducation est un droit fondamental. Il doit être assuré par la famille et si elle n’y parvient pas, il revient à la société de l’assumer… »
Le parcours éducatif de Malony, de six à dix-huit ans, qu’une juge des enfants et un éducateur tentent inlassablement de sauver.
La tête haute, d’Emmanuelle Bercot, a été présenté en ouverture du Festival de Cannes 2015.
Nous avons l’habitude de voir des films qui dénigrent les systèmes en place. Il est beaucoup plus rare de voir des films qui montrent que le système est bien et qu’il peut fonctionner.
C’est donc en véritable film coup-de-poing que La tête haute a reçu un accueil élogieux en France. Ses 8 nominations à la dernière cérémonie des César en sont une preuve éloquente. Rod Paradot (Malony) et Benoit Magimel y ont d’ailleurs remporté les César du Meilleur espoir masculin et du Meilleur acteur dans un second rôle. Il s’agit de la première expérience au grand écran de Rod Paradot, découvert lors d’un casting sauvage par la directrice de casting Elsa Pharaon à la sortie d’un lycée professionnel où il étudiait la menuiserie.
En regardant le film de Bercot, on ne peut s’empêcher de penser à ces éducateurs et travailleurs sociaux et au difficile travail qu’ils font chaque jour. Grâce à La tête haute, on réalise toute la persévérance, la patience, le dévouement et l’abnégation dont ces gens doivent faire preuve chaque jour. Comment ce fait-il que la réalisatrice en soit venue à voir cette institution de ce point de vue? « J’ai un oncle qui est éducateur et lorsque j’étais enfant, je lui ai rendu visite un été en Bretagne où il s’occupait d’un camp de jeunes délinquants, dont l’un était même un enfant criminel. J’avais été fascinée, moi, petite fille issue d’un milieu aisé, bien élevée, bien entourée, par les comportements de ces adolescents qui avaient eu moins de chance que moi, par leur effronterie, leur côté rebelle à l’autorité et aux conventions, et en même temps, j’avais été saisie par le travail fait par mon oncle et les autres éducateurs pour les ramener “sur le droit chemin” comme on dit, leur apprendre à s’aimer et à aimer, à respecter les autres, mais d’abord eux-mêmes. », expliquait la réalisatrice.
Cette explication de la réalisatrice m’amène à me questionner sur l’inspiration pour le rôle de Tess. Bercot se serait-elle inspirée de ses premières amours? Bien que souvent les rencontres amoureuses de ce type mènent plutôt au déclin de la fille, il se peut, parfois, que l’inverse arrive. Ou que la réalité se trouve quelque part entre les deux…
Outre la qualité du scénario et de la réalisation, c’est dans le jeu des acteurs et la force des personnages que La tête haute prend toute sa signification. En effet, il aurait été facile de tomber dans les clichés avec un personnage comme Malony. Un jeune homme provenant d’une famille pauvre, sans éducation… Ce genre de rôle est souvent donné à des personnages issus de l’immigration, malheureusement. Je dois aussi lever mon chapeau à Catherine Deneuve pour son interprétation de la juge. Ce genre de personne se doit, en quelque sorte, d’être une mère et un père pour les enfants dont elle s’occupe. Elle se doit d’être à la fois la figure d’autorité, à la fois la figure protectrice. Elle doit être en mesure de l’écouter et de sentir quand il va craquer, quand il est au bord des larmes sans même pouvoir dire à quel point c’est devenu impossible pour lui…
Mais la triste réalité de Malony vient certainement de sa mère (Sara Forestier). Lorsqu’une mère est prête à abandonner ses enfants parce qu’elle a un nouveau copain… La scène qui reflète le mieux la mentalité de cette femme est probablement ce moment où elle dit à son fils qu’elle ne lui donne pas son numéro de téléphone. Et elle finit par lui dire : « Bon, je te donne le numéro, mais tu n’appelles pas! » Avec une mère comme ça, on part certainement avec une prise contre soi.
La tête haute montre les forces et faiblesses d’un système nécessaire et qui, malgré toutes les difficultés, réussit à sauver une partie de la jeunesse française.
Note : 8/10
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