Le dernier film de Paolo Virzì, Les Opportunistes (Il capitale umano), est basé sur le roman américain Human Capital (2004) de Stephen Amidon. Le réalisateur a coécrit le scénario du film avec Francesco Bruni et Francesco Piccolo. Ils transposent alors une intrigue américaine que le romancier situait en 2001 sur la côte est des États-Unis dans le contexte italien actuel dans la Lombardie. Présenté dans de nombreux festivals à travers le monde dont le Festival de Tribeca à New York, Les Opportunistes représente l’Italie dans la course à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère.
Près du Lac de Côme en Italie. Les familles de la richissime Carla Bernaschi (Valeria Bruni Tedeschi) et de Dino Robelli (Fabrizio Bentivoglio), agent immobilier au bord de la faillite, sont liées par une même obsession : l’argent. Un accident la veille de Noël va brutalement changer leurs destins.
Les Opportunistes est un film polyphonique et c’est probablement ce qui m’a la plus séduite. Il faut dire que Les Fous de Bassan d’Anne Hébert est l’un de mes romans préférés, et c’est sa construction polyphonique qui contribue à en faire un si grand livre : une même histoire racontée par cinq personnages, dont la somme permet d’apprendre les circonstances entourant la mort des cousines Atkins. C’est le même principe ici. Une même histoire racontée selon trois points de vue et présentée en autant de chapitres : Dino, Carla et Serena (la fille de Dino : Matilde Gioli). Au fur et à mesure que les points de vue s’additionnent, le drame prend tout son sens. Le scénariste Francesco Bruni en parle comme d’un « travail presque mathématique de composition et de décomposition de la trame, fait de manière logique et extrêmement méthodique ».
Dino est le stéréotype du gars qui vendrait sa mère si cela lui permettait de s’enrichir et de jouer dans la cour des grands de ce monde. Carla, elle, est l’épouse qui s’ennuie. Elle a tout ce qu’elle désire, du moins, tout l’argent et les biens matériels, mais elle semble vide. Tout n’est que faux-semblant. Et même Serena qui semble être une jeune femme plutôt attentionnée se plie au jeu des apparences. C’est d’ailleurs en ce sens que s’exprimait Francesco Piccolo : « le film est aussi la mise en scène de la crise d’une famille, d’une ville et d’un pays racontée à travers les affres de quelques personnages clés ».
La compétition occupe aussi une place importante dans l’intrigue. La compétition dans le monde financier autant que celle dans le milieu scolaire. On présente aussi différentes facettes des conflits générationnels tant du point de vue des enfants qui subissent des pressions de leurs parents que des parents qui doivent rendre des comptes de leur irresponsabilité.
En avril dernier, Stephen Amidon s’entretenait de l’adaptation de Virzì avec Ron Charles du Washington Post : « I’d like to take all the credit, but to be honest that goes to the screenwriters and the director, Paolo Virzi, who made a terrific film. It is very Italian and yet somehow remains true to the core story. I guess money knows no borders. » [J’aimerais prendre tout le crédit, mais pour être honnête il va aux scénaristes et au réalisateur, Paolo Virzì, qui a fait un excellent film. Il est très italien et reste fidèle à l’histoire de base. Je suppose que l’argent ne connaît pas de frontières.] Avec l’économie mondiale disons plutôt incertaine, c’est d’autant plus vrai.
Les Opportunistes est un film policier, aux airs de suspense, et qui présente des gens avec peu de scrupule : « Vous avez misé sur la faillite de ce pays, et vous avez gagné. »
Note : 9/10
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