Présenté au FNC le 15 octobre à 19 h et le 18 octobre à 15 h 20, le troisième long métrage de Noël Mitrani (The Kate Logan Affair [2011] et Sur les traces d’Igor Rizzi [2007]), Le Militaire, porte sur la solitude et l’enfermement. Tourné à l’automne 2012 à Montréal, la maison de Laurent Lucas devient celle de son personnage Bertrand. L’acteur connaît ainsi intimement les lieux du tournage. Fait intéressant : près de 90 % des scènes ont été tournées en seule prise, ce qui n’est pas rien, et cela, sans répétition.
Suivant une diète stricte, surveillant scrupuleusement son taux de glycémie et sa tension artérielle, toujours vêtu d’une chemise blanche repassée avec soin, Bertrand se plie à une disciple ferme. Il tient un compte précis de ses activités à l’aide d’un magnétophone qu’il trimbale partout. Il ne sort que peu sauf pour photographier les jeunes femmes qu’il croise. Un jour, il demande à une femme, dont il apprendra par la suite qu’elle se prénomme Audrey (Noémie Godin-Vigneau), de lui acheter son manteau contre 500 $. Obsédé par le corps féminin, il est incapable d’établir de relation avec une femme dans le monde réel.
Le film aborde les difficultés que rencontre Bertrand, un ancien militaire, de prendre part à nouveau à la société. Visiblement marqué par les conflits armés, il fait des cauchemars, revit parfois les combats (on pense notamment à la scène d’ouverture) et souffre à une jambe, ce qui le force à utiliser une canne. Sa canne qui lui servira d’ailleurs de fusil dans ses conflits imaginaires. Comme le confiait le réalisateur en entrevue à la revue Séquences en mai dernier : « Le principe de base était de travailler sur un individu solitaire aux prises avec des traumatismes qui l’empêcheraient de faire face à la réalité, et plus particulièrement dans ses rapports avec les femmes. Ce qui est intéressant dans le personnage de Bertrand, c’est que sa rigueur morale, assimilée pendant son service à l’armée, contraste avec sa vie privée, plutôt à la dérive. » Le militaire transcrit des passages de la Bible, sans pour autant en suivre tous les commandements.
Filmé caméra à l’épaule, on sent parfois l’agitation du personnage par le mouvement même de la caméra plus marqué. Bertrand est omniprésent, il est dans presque tous les plans, au centre d’un univers que l’on sent fragile, sur le point d’éclater au moindre soubresaut. Mitrani utilise beaucoup les gros plans pour capter les émotions du protagoniste. Il nous le montre accomplissant les gestes du quotidien : peigne sa barbe, lave ses ongles, fait ses injections d’insuline, etc. Bien que ce dernier fait ne soit pas un défaut, le film tourne un peu à vide par moments. Et la fin, bien que positive pour Bernard, ne me paraît pas réaliste, du moins, elle ne devrait pas être sans conséquences pour sa santé physique.
Le Militaire témoigne de la vulnérabilité de l’homme, qui cherche à se raccrocher à de petits choses pour ne pas sombrer.
Note : 6,5/10
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