L’arrivée du cinéma parlant et l’ambiance historique des années 1930 mettent la table pour un nouveau genre cinématographique en France : le réalisme poétique. Visant à montrer la vie quotidienne, aussi banale soit-elle, sous un nouveau jour en lui conférant une saveur poétique, ce genre représente l’âge d’or du cinéma français. Des figures emblématiques, telles que le réalisateur Jean Renoir et l’acteur Jean Gabin, émergent. Dans cette ère de propagande allemande, d’occupation et de discours communistes, les œuvres du réalisme poétique prennent souvent des airs d’engagement et de combativité.
Julien Duvivier réalise La Belle Équipe en 1936, où l’on suit un groupe de chômeurs qui forment une coopérative dans le but de restaurer un vieux café. Contexte historique oblige, les aspirations du Front populaire sont transposées dans cette œuvre. L’opposition entre les désirs individuels et le bien de la collectivité est constante. La particularité de ce film réside certainement dans sa double fin. Dans une version, les personnages surmontent les difficultés encourues et triomphent, motivés par un objectif commun, alors que, dans l’autre, ils échouent et périssent, obnubilés par leurs rêves individuels. Duvivier n’offrira pas moins d’une demi-douzaine de films au cours de la décennie 1930, dont Pépé le Moko (1937), la Fin du jour (1939) et Maria Chapdelaine, titre adapté de nouveau en 2021 par le réalisateur québécois Sébastien Pilote.
Le Front populaire et le communisme inspirent également Jean Renoir, qui leur dédie La vie est à nous en 1936. Parmi les premiers films militants français, cette œuvre sert de propagande au parti communiste. Les scènes jouées s’enchaînent entre les discours politiques. Pour sa part, La Marseillaise (1937) nous transporte lors de la Révolution française. La dualité de personnages fictifs et de faits historiques est utilisée de nouveau. Renoir poursuit sa lancée la même année avec La Grande illusion, histoire présentant des soldats français de la Première Guerre mondiale faits prisonniers par les Allemands. Le message est clair : l’aristocratie n’a pas sa place dans l’armée. En 1938, La Bête humaine, reprise par Renoir, dépeint un certain idéal, toujours plongé dans la propagande. Jean Gabin y tient le rôle principal, comme dans la plupart des films de ce courant cinématographique.
On ne pourrait passer sous silence le drame vécu par le déserteur dans Le Quai des brumes de Michel Carné, ainsi qu’une foule d’autres œuvres où on retrouve ce discours engagé du réalisme poétique, qui est bien ancré dans la période historique mouvementée dans laquelle il surgit.
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