« I’m a caregiver… Whatelse? »
[Je prends soins d’un homme âgé… Quoi d’autre?]
Joshua (Rogelio Balagtas), un immigrant philippin timide d’âge moyen a vécu toute sa vie dans le confort de la maison de ses parents. Il supplie Dieu de lui trouver une femme de peur d’être seul pour toujours. Lorsque sa mère décède subitement, il quitte son emploi pour s’occuper de son père à plein temps. Inexpérimenté pour prendre soin de qui que ce soit, y compris de lui-même, Joshua se débat afin de réussir à prendre soins de son père. L’aide arrive lorsque Marisol (Sheila Lotuaco), une cousine, vient de l’étranger, dont la chaleur et l’éducation insufflent une nouvelle vie à la maison et suscitent en lui des émotions confuses.
Avec Islands, Martin Edralin explore l’expérience de la diaspora philippine dans une histoire décalée de devoir filial et de difficultés propre à un peuple en besoin d’exil.
Les Philippines sont un des pays qui envoie le plus de citoyens à l’étranger chaque année. Le pays est pauvre et ses habitants ont de la difficulté à se nourrir. Il est donc plus que fréquent qu’au moins une personne par famille quitte afin de gagner un salaire correct pour ensuite envoyer une partie de son salaire et des cadeaux à toute sa famille (élargie).
Les femmes quittent et travaillent comme nounou avec des enfants ou comme « caregiver » pour des personnes âgées. Parfois les deux. Marisol représente cette partie de la population. Cette femme qui a tout abandonné afin de gagner un salaire (de misère selon nos normes) pour aider sa famille demeurée aux Philippines. Elle se retrouve à travailler au Koweït pour une famille qui abuse d’elle. Pas de jours de congé, un travail exigeant et des abus psychologiques et physiques.
Joshua, lui, représente une partie des hommes de cette diaspora. Il travaille physiquement (comme concierge), espère se trouver une femme et reste entouré de sa communauté philippine. Il ne sait pas s’occuper de la maison, ni cuisiner. Dans la culture philippine, ce sont les femmes qui cuisinent. Et elle cuisine beaucoup.
Islands montre merveilleusement bien la réalité de ces immigrants qui galèrent pour aider leur famille tout en ne se mêlant pas, ou très peu, à la population de leur pays d’adoption.
En plus de cette représentation de la diaspora philippine, le film traite du deuil et des conséquences de la mort des proches pour les gens qui n’ont personne d’autre. À la mort de sa mère, Joshua se retrouve complètement perdu, dans un univers qui n’est pas le sien. Sa mère était la maîtresse de maison et la colonne de la famille.
Dès la mort de la matriarche, le film prend un rythme lent. L’image aux tons de bleu sombre et à la texture granuleuse ajoute à cet esprit de tristesse et de perte de repères. L’arrivée de la cousine amène également un changement visuel puisqu’elle apporte une certaine lumière au triste Joshua.
S’il y a une chose qui ressort de ce film, c’est à quel point les immigrants philippins mènent une vie que nous pourrions considérer vide de sens. Quand on regarde les personnages de Islands, il est difficile d’y voir du positif. Évidemment, ce n’est pas le cas de tous. Mais pour ce que j’en connais, ce n’est pas la communauté culturelle qui semble avoir la vie la plus gratifiante.
Cela étant dit, Islands est un magnifique film sur la solitude d’un homme et sur les difficultés d’une communauté.
Bande-annonce
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