Les grands esprits – Résignation acquise

« À force d’échecs, il se sera résigné. »
Caroline

Affiche de Les grands espritsFrançois Foucault (Denis Podalydès), la quarantaine, est professeur agrégé de lettres au lycée Henri IV, à Paris. Une suite d’évènements le force à accepter une mutation d’un an dans un collège de banlieue classé REP +. Il redoute le pire. À juste titre.

Pour réaliser Les grands esprits, Olivier Ayache-Vidal a entrepris une longue recherche sur le terrain. Sans que son film devienne un documentaire, il le voulait le plus réaliste possible, et ce, jusque dans sa technique : tourné à l’épaule, sans lumière artificielle.

Immersion

Pendant plus de deux ans, Olivier Ayache-Vidal s’est fondu dans le décor du collège Maurice Thorez de Stains, dans la cité du Clos Saint-Lazare, afin de s’imprégner pleinement de la vie de cet établissement. Il a assisté aux cours, aux réunions de professeurs, etc. En fait, il a eu accès à l’ensemble du collège, un accès tout à fait privilégié.

Il a fait appel à des comédiens professionnels pour la plupart des rôles principaux. Quant aux autres rôles, il a choisi de faire appel à ceux qui connaissaient le mieux la réalité du collège : « Au contact des élèves, il m’est apparu évident qu’ils étaient les seuls à pouvoir transcrire leurs mots et que personne n’incarnerait mieux qu’eux leurs propres personnages. » Le film a ainsi été tourné à Stains, à l’été 2016, dans l’enceinte du collègue.

Et pour ajouter au réalisme de son scénario, il expliquait que « [l]es dialogues et les personnages sont tous le fruit de cette observation, en cela il n’y a pas de travail de “création” ».

La résignation acquise

François et Caroline, dans Les grands esprits
François et Caroline

C’est la sœur de François, Caroline (Léa Drucker), qui lui explique le concept de résignation acquise par l’entremise d’une expérience avec des poissons. On divise un aquarium avec une vitre. D’un côté, on y met un brochet, et de l’autre, de petits poissons. Le brochet tentera immédiatement d’aller dévorer les petits poissons, mais il se heurtera à la vitre. Après plusieurs tentatives, découragé, il se résignera. Il sera alors possible d’enlever la vitre et de laisser nager les petits poissons en toute sécurité.

Un principe similaire s’applique à l’humain. Si une personne se fait constamment dire qu’elle est mauvaise ou incapable, elle finira par le croire. Si elle le croit, elle ne parviendra plus à résoudre des situations pour lesquelles elle dispose pourtant des connaissances nécessaires.

Adaptation pédagogique

Au Québec, de nos jours, aucun professeur ne distribue les copies des élèves en disant à voix haute les mauvaises notes et en commentant négativement leur performance. Peut-être est-ce différent en France, je ne saurais le dire avec certitude. Mais cet exercice est particulièrement humiliant et renforce immanquablement le sentiment d’échec et d’incompétence de l’élève qui accumule les mauvaises notes.

Seydou, dans Les grands esprits
Seydou

Ce manque d’encouragements et de confiance de soi brime de trop nombreux jeunes. Je ne lance cependant pas la pierre aux professeurs. Ayant moi-même travaillé pendant quelque temps dans des écoles secondaires, certains groupes sont parfois très difficiles à gérer. Et on a parfois le sentiment de ne pas être suffisamment outillé ou de ne pas avoir les moyens de nos ambitions.

Quant au personnage de François, il est un professeur plutôt rigide qui use de cette méthode peu flatteuse en remettant les copies des élèves. Mais face au discours de sa sœur et devant les difficultés d’adaptation qu’il rencontre dans son nouveau collège, il est forcé d’envisager de nouvelles approches à son enseignement.

Mais encore…

Le film, quoique bien construit, ne révolutionne pas le genre. On s’attend un peu à la finale. On s’imagine rapidement que le professeur parviendra à s’adapter à sa nouvelle réalité, à se faire accepter (autant que cela est possible) par ses élèves issus d’un tout autre milieu que le sien. L’écoute en reste pourtant agréable.

Seydou et François, dans Les grands esprits
Seydou et François

Il faut dire que Denis Podalydès joue très bien, et que les acteurs non professionnels sont aussi convaincants. Le film est plein de sensibilité et d’humour, et représente bien cette période trouble de la vie qu’est l’adolescence, à cet âge où les jeunes doivent faire des choix importants pour leur avenir.

Les grands esprits montre les différents enjeux vécus par les adolescents, coincés entre l’enfance et l’âge adulte.

Note : 7/10

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